24.2.08

Nouvelles du socle granitique

Parmi les choses heureuses et douces que mes parents m'ont transmises, leur dernier cadeau en date - une vieille grange transformée en maison de famille - est peut-être le plus beau.

Trois ans qu'ils clouent vissent construisent, trois ans qu'ils passent de département en département pour que la remise en haut de la montagne devienne un nouveau lieu de vie.

Et ça marche. Marmaille partout, fignolages en cours, parquet ancien et couleurs vives : le grenier à foin est devenu foyer.

Anton et Zadig coupent des bâtons, jouent près des abreuvoirs pendant que leur grand-mère, l'oeil sombre, leur recommande de faire attention aux six voitures qui chaque jour traversent le village.

Cousins, oncles et tantes, pour des apéritifs où nous rions fort pendant que les enfants dévorent les saucissons que nous n'en pouvons plus de couper. J'ai même entendu l'occitan, la vieille langue, dans la bouche de mes fils.

Comme c'est étrange. Moi qui me sentais coupé de tout.

Princesse a pris sa journée au ski : elle est revenue plus étincelante que jamais (même si, tout à mon rôle de bon fils, j'avais un peu de mal à lui dire combien je l'aimais).

Et puis il y avait les moments de silence où, la pièce centrale abandonnée, j'allumais mon dictaphone et mon ordinateur pour écrire ; les moments où j'emmenais les enfants près du lac gelé, pour jouer au base-ball avec des pommes de pin - elles ricochaient sur la glace, glissant à la surface miraculeuse.
Je leur ai raconté l'histoire de Capdemule, l'enfant têtu qui ne voulait plus bouger, et que le lac recouvrit jusqu'au crâne - c'était ce rocher qui dépassait au milieu de l'étang. Nous avons cherché dans le ciel ce que dessinaient les nuages.

Je me suis assis au soleil, posé sur un socle granitique, dans la montagne que les enfants escaladaient en alpinistes miniatures.

Et j'ai respiré l'odeur du ciel bleu acier, de l'herbe d'hiver et des bouleaux qui tracent des ombres blanches sur les sapins.

En revenant à la ville, j'ai mis France Info. Je me demandais ce qu'avait fait le monde, depuis que je l'avais quitté - pariant avec moi-même qu'on me donnerait dans les trois minutes des nouvelles de l'agitation présidentielle (l'homme qui griffe l'air pour ralentir sa chute).

Monstres en prison (tant pis pour la justice), gastronomie à l'honneur : la politique Jean-Pierre Pernaut se porte bien, merci pour elle. Mais ces choses-là changent plus vite que les reflets du granit, que la forme des nuages dans le ciel, alors pourquoi s'en faire ? Si elles deviennent oppressantes, je repartirai vers l'oxygène d'altitude (prendre un peu de hauteur est-il vraiment égoïste ?)

Retrouver Gros Chien et ses yeux fatigués (c'est qu'il a bien bossé, le type, même qu'il remonte à Paris le clamer haut et fort), nos jeux faciles et nos rires ; écrire tout en parlant, laisser se dérouler l'histoire ; faire rire Princesse en lui faisant l'amour.

End of the break : demain, les choses c'est rieuses.

1 commentaire:

Oh!91 a dit…

juste pour dire encore le plaisir d'être dans le partage de ces lieux et ces moments.