31.12.10

919 - Pas aujourd'hui

All obstacles in my way
1) Injustice du sort

Alors comme ça, sous prétexte que demain tout sera neuf, immaculé, plein de gueule de bois et de bonnes intentions, on en oublierait aujourd'hui ?
C'est dommage ; la lumière est jaune oblique sur les volets fermés, devant chez moi ; j'ai médité longtemps, posé sur le sommet de mon crâne, à la recherche de la maîtrise du temps.
Quelque chose se pose ; plus rien n'attend.

3) Bonnes résolutions

Il n'y aura pas de 2 aujourd'hui.

4) Le statut fb auquel vous avez échappé

Manu Causse Plisson (photo)
6780, 6779, 6778, 6777...

5) Le statut fb auquel vous échapperez demain

Manu Causse Plisson (photo)
3153600, 3153599, 3153598...

6) Le nom du gouffre

Comme si, d'un tour illusoire
de sablier
on écartait pour un temps la blancheur des abîmes

7) Qualité littéraire en berne

Bu, hier, des thés fumés, reparlant du Chérie de Maman avec B.O ; écrit de nouvelles pages de L'eau des rêves, enregistré un début de refonte de chanson ; marché, longtemps, en portant tout le poids des épaules, en sentant la douleur de mes pieds. Et cuisiné, apprécié, parlé avec cette femme superbe que si souvent j'appelle Toi.
Quelque chose témoigne donc que, le 30.12.2010, j'étais en vie.
Cela augure plutôt bien de la suite.

30.12.10

918 - Cent fois sur le métier

Petites mains d'ours
1) Wanabee
(spécialement dédié à l'inextinguible colère)


"Très franchement", m'écrit une éditrice à propos de Ma vie n'est pas un roman, bordel, "je n'ai pas envie de suivre le destin du personnage qui livre ses théories sur la vie en couple. L'ensemble ne présente aucun intérêt au lecteur. Des idées en pêle mêle, libre cours de la pensée, flot de conscience dénué de sens, tout ceci ne revêt aucune valeur littéraire".


Dont acte. Je me contenterai d'envoyer par retour de courrier un doigt sectionné d'Emmanuelle Urien.
Sauf que, prétend-elle, elle en a besoin pour taper ses romans. D'où la photo.


Cela dit, notre éditrice a parfaitement raison : ce non-roman s'est écrit tout seul, en une grosse semaine, au moment où je déménageais ; il n'est qu'une suite d'idées - obsessionnelles, malsaines - sur le couple, l'enfermement, le devenir.
Et le personnage est odieux : il s'appelle Toi.

2) Le sens de la formule

Manu Causse-Plisson (photo) ramasse ses dents avec ses doigts cassés
Manu Causse-Plisson (photo) n'a aucune valeur littéraire
Manu Causse-Plisson (photo) tant va l'accroche hallu
... et bien d'autres encore,
sont des statuts facebook auxquels vous avez échappé.

3) Dans un registre proche

Ce petit album de Loustal et Benacquista raconte, entre autres, l'histoire d'un homme qui enferme ses démons dans un petit cahier, lui-même enfermé dans un tiroir ; la réponse de notre éditrice pleine de tact et de mesure pourrait m'inciter à l'imiter.
Si je n'avais tendance à croire que les démons ne deviennent puissants que lorsqu'on les enferme.

4) Comptes de fin d'année 


2 recueils de nouvelles publiés, dont 1 réédité en 2011 ; 2 pièces de théâtre et demie jouées ; trois romans bilingues, quelques nouvelles publiées en recueil ou sous forme de cartes postale... et mon compte en banque pratiquement en équilibre - dix centimes de découvert, voilà, c'est presque net. Ma vie est une réussite exemplaire. Ma vie est un échec total.
Ma vie, en tout cas, n'est pas un roman.


5) Chevalier blanc
 
J'ai bien entendu envie de tout laisser tomber - écriture, musique, roman en cours, projets... C'est même, je le suppose, le but de ce courrier : tester le coeur de l'auteur. Le mettre à l'épreuve.
D'accord. Un jour, je serai sage.

29.12.10

917 - S'émerveiller encore

Putain, on a oublié les chips.
1) Le difficile

M'émerveiller. Laisser la place à la surprise. Effacer ces habitudes de mes pensées qui anticipent, comprennent - annulent - le doux, le tendre, le plaisir.
Et(r)eindre les références.

2) Des nouvelles du front de l'édition

Croisé hier soir dans un dîner en ville l'auteur Emmanuelle Urien.
La pauvre femme. Elle a coupé ses cheveux, travaille à corps perdu (ce qui est fort dommage), prépare un roman qui fera date.
Si. Si et seulement si.
Elle a dégagé sa nuque et je fourbis ma hache de bourreau.
Elle ignore de toute évidence que je n'hésiterais pas à l'abattre.
Si toi, éditeur, ne déclare pas publiquement que mes oeuvres sont à des kilomètres au-dessus du commun de la production littéraire des trois siècles derniers.
J'attends.

3) Stupeur du matin

Quelle horreur, ai-je pensé en me réveillant. Je numérote mes posts et les divise en plusieurs paragraphes. Je ne suis qu'un pâle imitateur d'Eric Chevillard. 
Dois-je l'éliminer lui aussi ?

4) La colère, grosso modo

Au fond, je ne suis pas contre le fait qu'il y ait d'autres écrivains que moi.
Je trouve simplement aberrant qu'on les lise.

5) Visitez la polygamie

A.A, une jeune et charmante habitante de Facebook, me propose un mariage officiel dans le monde virtuel - et réciproquement.
J'avoue que j'hésite : pourra-t-elle supporter toute les jalousies qu'elle va faire naître ?
Néanmoins, tout comme les statistiques de lecture de ce blog, les messages d'amis sur myspace, les appels du téléphone portable ou les conversations virtuelles, cette offre a le mérite de me faire croire que j'existe.
Ce que me répètent mes proches, mais ajouter foi à leur propos ? Je vois bien qu'ils ne le disent que pour me faire plaisir.

6) A quoi tu joues ?

Au con, répondit l'ombre.

7) Nous, au complet

Petit addendum pour signaler ce post crucifié chez Oh, et celui-ci chez Maïa Ubersex - sur le plaisir et ses facilités - avec ses commentaires inquiets. 

28.12.10

916 - En ordre de marche

d'un bleu si chauve
1) Cadeaux

- Tiens, on t'a pris ça pour Noël !
- Mais... je n'en mets jamais.
- Bin justement.

Echec annuel du cadeau parfait - qui, symbolisant tout l'amour que se portent celui qui donne et celui qui reçoit, illuminera leur vie à tous deux.
Note pour l'avenir : renoncer chaque année à l'idée qu'un vélo rouge, une poupée blonde ou une base spatiale assurera la pérennité du bonheur.

2) Caméléon

Madame, monsieur, chers policiers,

J'ai le regret de porter à votre connaissance les faits suivants : des individus peu recommandables se réunissent tous les deuxième et quatrième mardis du mois dans un bouge du centre ville de Toulouse (ci-après dénommé Petit London) pour enregistrer de 20h à 21h une émission radiophonique diffusée en direct sur les ondes de Radio Mon Païs, et dont le but semble être de critiquer l'action pourtant irréprochable de notre bien-aimé gouvernement, tout en répandant calomnies et analyses fallacieuses sur la réalité économique et morale de notre beau pays.

Mon devoir de citoyen m'incite tout naturellement à vous informer de ces agissements de nature à porter atteinte à l'ordre établi ; mais plus encore, j'ai décidé de participer à cette émission afin d'y porter la belle et bonne parole de nos dirigeants.

Moi, Aymeric de la Mouille, tiendrai donc ce soir (pour peu que la paresse et le je-m'en-foutisme exacerbé des techniciens et exécutants de gauche le permettent) une chronique musicale et pleine de bon goût au cours de l'émission "Pas plus haut que le bord" au Petit London ; afin de vérifier la dangerosité de cette dernière, je vous invite à vous joindre à nous lors de son enregistrement (rue Riquet, Toulouse), à la suivre par le truchement des ondes radio (90.1 fm dans la région toulousaine) ou via le web.

au nom de notre gouvernement, je vous remercie

Aymeric de la Mouille
& sa chargée de conne Lola Parabellum

Les commentaires, réactions et dons en espèce sont à renvoyer à delamouille@gmail.com. Si vous souhaitez ne plus faire partie de cette liste de diffusion, merci de nous le signaler, nous en réfèrerons au commissariat de votre quartier.



23.12.10

915 - Revenu de tout

1) Reality check

quelqu'un baigne
Les enfants gloussent devant la télé, il pleut à grand bruit ; la cuisine sent encore le repas d'hier, les amis, les retrouvailles.
Quelque chose se passe dans nos ventres (j'ai pris des kilos reperdu des kilos et je mange moins vite, des amis sont partis et d'autres reviendront, les blessures dirait-on cicatrisent, j'apprends de la douleur, le calme parfois s'installe, presque surprenant, presque coupable), nous allons semble-t-il vers cette paix que nous cherchions - c'est peut-être une mort, et c'est peut-être ce que nous sommes chargés d'apprendre,
il fait beau aujourd'hui, beau comme un jour de pluie.
Les enfants se disputent, puis s'arrêtent d'eux-mêmes.
Vingt-trois décembre, année 2010, juste après le solstice, quelque part au milieu de nos vies d'un bureau d'une ville du monde.

2) Aux confins du statut facebook

Normal is fine. Fine ain't normal.


3) Des nouvelles des éditeurs

J'en oublierai presque ma mission suprême, faire éditer l'intégrale de mon oeuvre en collection Pléïade quadrilingue (sur papier marbre). D'ores et déjà, quelques éditeurs, impressionnés à juste titre par mes menaces, commencent à céder du terrain. Par exemple en disant, d'un projet d'album, "Nous n'aimons pas le dessin et le texte ne nous emballe pas vraiment".
Tu sens, comment ils sont prêt à céder ? Un éditeur qui joue l'adverbe, qui dit "ne nous emballe pas vraiment" au lieu de "c'est à chier", de toute évidence, c'est un signe.
On avance, oui.
(Au chapitre des nouvelles bien moins intéressantes que ces refus de publication, il devrait y avoir en 2011 la réédition de Petit guide des transports, chez DNSB cette fois, une nouvelle nouvelle dans un projet de recueil collectif encore secret, un extrait de La Fête à Fred version théâtrale dans une revue aussi toulousaine qu'esclusive. Mais bon, j'ai le triomphe ultramodeste, et le sens de la défaite hypertrophié).

4) Trève des confiseurs

On peut se l'avouer, maintenant : il semblerait bien que ce blog a repris. Ce qui ne l'empêchera pas de se mettre en pause pour les quelques jours à venir.
Dire du mal de Noël, c'est sacré.

21.12.10

914 - Solstices divers

Quand je te dis que la lumière était belle.
1) Christmas vortex

Et le cours de ton existence, à ce moment de l'année, est semble-t-il entravé par, dans le désordre :
- les attentes des enfants (y compris l'avorton en toi aux yeux émerveillés, et ses souvenirs aux couleurs vives)
- l'espérance des parents (y compris l'inflexible en toi à la barbe de juge qui veut que tout se passe bien, bordel, que ce soit du bonheur en conserve avec le petit doigt sur la couture du pantalon de ski)
- les entrelacs familiaux (y compris le temps qui passe et semble n'user, ce con, que la grande confiance et les élans du coeur pour ne laisser à force que les aspérités molles des petites rancoeurs et des avis des autres, ces familles à qui nous en voulons de tant nous ressembler)
Tu tentes de couler, paisible, ou de rugir, torrent de la montagne ; mais voilà, les eaux se mêlent, la lune est pleine et la neige immobilise les pays de tes sentiments. Alors tu plonges, tête en avant dans le vortex familial - tu retiens, le plus longtemps possible, ta respiration.
Car l'air est rare, là-haut, à Noël.

2) Entr'apercevoir la réalité

On tente de me faire croire que le monde se résume à la réalité qu'en perçoit ton corps. Ainsi de la longue promenade dans la ville, hier, et au parc (au jardin japonais, le pont était rouge, Elle et moi étions suspendus, les enfants s'amusaient) - et de la douleur bleutée dans ma cheville cisaillant ma patience : les gosses, c'est officiel, étaient carrément chiants.

3) La phrase que je n'ai pas prononcée cette année

Parce que quand même, que je le veuille ou non, on continue d'y croire,
C'est quoi, mon cadeau ?

20.12.10

913 - Dire et redire

De garde
1) Effroi

Amusante, cette rage dans la nuit, ce souffle court ce ventre
Tendu,
Cette détestation du monde
Petit tigre tout entier perdu dans sa colère de plastique,
Inconséquent
(et la capacité, par miracle, qu'en un instant une respiration tout change, tout prenne une place
différente, va savoir ce que nous sommes).
Je suis celui qui compte les je suis dans ses ventres et ventricules, dans ses coeurs et ses estomacs.

2) Ménage à trois

Endormi hier entre une belle et une autre ; je voulais déposer les armes, me mêler aux murmures des filles, ces sifflements discrets. Je voulais être autre, je ne fus que dormeur.
Ici, Eric Chevillard élucide la dispute amoureuse. Rien à ajouter.

3) Et sinon

Mais je vais bien, tu sais. Bien malgré tout ce mal qui se traîne derrière moi, comme lié par une chaîne. Bien malgré le sourire nauséeux qui me fait dire, mais cesse de te plaindre. Bien malgré l'étendue de ce que je ne comprends pas, minuscule au ras de la réalité.
Les enfants vont bien, c'est l'essentiel. Les histoires progressent. J'apprends à les quitter.
Je déteste leur besoin de contrôle et d'assurance - semblable, trop, au mien.

19.12.10

912 - All of this love

L'arbre
1) Tourner à l'aigre

Alors voilà, ô mon coeur,
où nous mènent tes dérives,
Tourner à l'aigre, cracher, rancir,

Dire des mots à voix haute, des mots de l'ombre
Au clair du jour (mais seul dans la rue)
Alors voilà, ô mes doutes,
notre cours nous mène ;

et trois cents, mille images,
mille histoires qui pourraient
remplacer cette nausée triste
(et pourtant si légère)
qu'on dit réalité.

2) Elle

Que je cherche toujours, là où il n'y a que des tu.

3) Bon dimanche sous vos applaudissements

En ce moment je déteste être l'homme de la famille, et m'en sentir incapable ; le mari fidèle, la pierre sur qui l'on compte et qui ne sait que sombrer. Noël approche, déprime saisonnière. J'ai le bonheur sous les yeux, et je cherche où m'enfuir.
Pitoyable, tout de même.

4) Et sinon

Décroché un ballon de rugby dans un arbre, brunché, écouté les enfants. Respire, petit homme, respire grand (me répète ma sorcière). Peut-être que tout ce malaise ne vient que de ton coeur. Pas du monde, pas de l'autre.
Cherche. Noël est encore loin.

17.12.10

911 - Urgence, bien sûr

1) Allez, quoi

D'où cette colère, d'où cette rage ?
D'où ce tremblement entre le coeur et l'épaule ?
Planté, juché sur toi-même,
Attendant le pardon ou la gloire
(le glaive)
Attendant que l'on cesse d'attendre,
Attendant le pardon que l'on nomme
L'autre, ou le toi
(et ton poing, direct, qui transperce,
ton cri qui ne viendra jamais,
la crûe bouillante des viscères,
le ventre que l'on fend, le mauvais)

Ce matin de décembre tu ne reconnais que toi-même,
et encore,
à regrets.

2) Les enfants vont bien

Ils apprennent à résister à mes colères. La cellule familiale bien souvent me fait exploser.
Je suis rentré fatigué hier des courses de noyel ; ma cheville, vieille cheville d'écrivain, me faisait souffrir. J'ai pesté. Anton, mon merveilleux, qui nous attendait à la maison (désormais il a sa clé, et connaît le chemin de l'école) m'a proposé un thé.
Je m'en suis voulu d'être cette vieille femme bougonne que douleur et fatigue empêchent de voir le monde.
Elle s'est néanmoins couchée et réveillée à mes côtés.
Ma douleur, pensait-il, c'est tout moi.

3) And now for something completely pas pareil

Ces artistes toulousains, bordéliques à souhait, poussés par un même désir...
L'édition 2011 s'annonce très prometteuse.

16.12.10

910 - When I think of love as something new

Sphynx ou l'eau des rêves
1) En ordre de marche
Depuis l'interruption grossière de ce blog, j'ai
-pris et reperdu des kilos,
-perdu et trouvé des amis,
-trouvé et gardé un peu de doux au ventre,
-gardé et enfermé quelques morceaux de rage
-enfermé, puis libéré, quelques quelques graines de querelle,
-libéré parfois des pépites de palpitation.
Maintenant, c'est Noël ou presque, je pèse moins sur moi-même, me prépare à l'ironie des cadeaux, au vortex familial, à la bonne chère.
Je n'ose me préparer à l'inattendu.

2) Le traître
Une jeune et charmante lectrice d'Orléans me demande de lui faire aimer Faceboook. FB, pour les intimes, c'est rappelons-le l'endroit où j'ai épanché pendant ces quelques mois la plupart de mes envies d'écrire, de me dire, de me raconter - de crier à la face du ciel "Enculé de milodju j'existe !", avec cette question-tag ensuite, "Non ?".
Très chère A., pour aimer FB (si l'on ne se préoccupe pas de donner de ses nouvelles ou d'affiner son sens de l'aphorisme), il suffit de ne plus poser cette dernière question. C'est une question de dépendance, au fond - crois-moi, je suis ceinture noire de dépendance. On sent cette poussée, cette attraction vers la page web où s'agite le domaine informe des possibles, et à force nos pieds quittent la terre, nos coeurs remontent dans nos gorges et nos épaules s'arc-boutent jusqu'à ce qu'on ait consulté.
Et la consultation, bien souvent, déçoit.
Repose tes épaules, respire doucement, déçue de Facebook. Car rien n'a plus d'importance qu'un vrai sourire, aujourd'hui.

3) Serial killer

Vous me connaissez : je bavarde, je bavarde, et j'en oublie mon premier point : me faire éditer.


Sans quoi, je tue une écrivaine, et qui plus est une auteur - Emmanuelle Urien, pour ne pas la nommer, car il faut bien le dire, son talent, autant que sa beauté, sa douceur et son intelligence, mais aussi les terribles zones d'obscur et de colère au fond de son coeur - me font ombrage. De toute évidence, ("de toute évidence" est un tic de langage, ami éditeur, tu ne l'avais pas vu ?)

A ce sujet, un apprenti éditeur de la région parisienne me demande, inquiet : mais que voulez-vous que l'on édite ?
Le Chéri de Maman
Ah, bonne question. J'ai peu ou prou renoncé au roman explosé intitulé E(u)x, me fout du roman intitulé Ma vie n'est pas un roman bordel ainsi que du recueil de nouvelles provisoirement désigné par le titre Déjà que tout seul je ne peux pas vivre ensemble ; j'ai tellement confiance en ce projet,  Le chéri de Maman, que je vous offre une deuxième illustration (signée Bernard Olivié)  sur ce post (ne me remerciez pas, c'est Noël). Je ne parle pas du projet en SF, ni de ceux en musique, ni même de cette nouvelle secrète pour laquelle je ne mets pas de lien et où j'assassine impunément familles, éditeurs, veaux, vaches, cochons, couvées...

Non, chez éditeur de la région parisienne, je voudrais juste (pardon, j'exige) que vous éditiez mon prochain roman, intitulé L'eau des rêves. Le pitch ? Vous l'avez sous les yeux, en haut de cette page.

Alors, où est-ce que je signe ?

14.12.10

909 - Témoin d'un accident (avec délit de fuite)

autoportrait sans le ventre
1) Chère madame l'assurance

Pour te montrer que je ne t'en veux pas d'augmenter tes tarifs, ce qui fait qu'il sera de plus en plus cher de se protéger et conséquemment de plus en plus cher d'être pauvre, je réponds à ta demande et te raconte ici ce dont je fus témoin le lundi matin de la semaine pénultième.



2) Il faisait beau ce jour-là

Et j'avais coupé par le parc. Le Parc Bonnefoy, qui ne s'appelle pas comme ça en vrai, mais je trouve joli qu'un parc et qu'un quartier porte le nom d'un poète.
Je revenais d'accompagner mon fils au métro. Tu sais, le grand, celui qui m'inquiète souvent par son côté taciturne, par ses yeux qui se perdent au fond de sa tête. Tu sais quoi ? Depuis quelques semaines entrée en 6e, changement naturel ou résolution des tensions intérieures, tout va mieux entre nous. Je l'avais accompagné à l'entrée de la station ; il avait choisi de prendre l'ascenseur et je l'ai laissé faire (même si je me dis parfois qu'un vrai père devrait l'obliger à faire de l'exercice).
Je l'ai laissé partir en presque souriant, malgré ce sentiment d'arrachage chaque fois que son dos se tourne et qu'il marche vers l'école.
Et puis je suis rentré chez moi, par la rue de Périole, juste derrière la gare. J'aime bien la poésie qui se dégage de ce monstre industriel. Je regardais les files de voitures, les conducteurs qui fumaient, toussaient, écoutaient des radios. Les moteurs puaient, les voitures au pas étaient des échardes de verre entre le lit matinal et le travail énervé. J'ai retraversé le parc, heureux à la pensée que cette vie-là était finie pour moi, que je m'étais sorti des embouteillages.
Au coin du parc, j'ai tourné dans l'avenue du Faubourg ; j'ai remonté sur le trottoir de gauche, devant le centre culturel et le parking des bicyclettes.
Et il y a eu ce bruit.
On dit "la tôle froissée", mais c'est en fait du plastique qui se déchire. On reconnaît quoi qu'il en soit le bruit d'une chute sur le macadam.
Je me suis retourné ; une dame, dans une voiture (une berline opel, beige métallisée, immatriculée dans l'Indre ou l'Isère, et qui venait de se faufiler dans le trafic en provenance d'une rue adjacente), regardait dans son rétroviseur. Elle a dû ne rien voir - moi-même, quand j'ai regardé derrière, je n'ai vu qu'un monsieur, dans une Peugeot gris métallisé.
Il m'a fallu quelques secondes pour distinguer, par terre, sur le goudron, une couleur orange, pas métallisée du tout ; un morceau de plastique, une calandre, celle d'un scooter qui gisait là. Des gens déjà ramassait une jeune fille - doucement, précautionneusement. J'ai vu qu'elle parlait, qu'elle semblait calme ; j'ai failli repartir vers chez moi.
Et puis bon, on ne sait jamais. J'ai un brevet de secourisme, après tout. Et puis qui sait, parfois les gens sont cons.


3) Les gens sont gentils (d'où le mot, d'ailleurs)

Il y avait une infirmière, qui constatait ; il y avait le monsieur de la Peugeot grise, dont les mains tremblaient sur le téléphone. Le scooter l'avait percuté par l'arrière, et il s'était garé un peu plus loin.
Il avait une tête, oserai-je le dire ? de petit patron de droite. De chef, en tout cas. Mais un chef qui tremble, un chef qui hésite, qui ne sait plus où donner de la tête, qui regrette déjà même si rien n'est de sa faute, il a juste ralenti pour laisser passer la dame à l'opel, le feu était vert, je suppose - ce type-là faisait humain. Tu me comprends, madame l'assurance ? Il faisait humain, pas pitié. Je lui ai proposé mon écharpe, il n'avait qu'une veste.
Un jour, près d'un carrefour, on m'a tendu un café avec deux sucres ; la voiture où je me trouvais venait de se renverser. Dans ma tête de gamin de 17 ans, j'ai vu, j'ai vraiment vu, je te jure, la mort qui allait m'arriver.  A 17 ans, la salope. Et le café avec deux sucres, une heure plus tard, en regardant les lumières bleues et rouges des pompiers, avait le goût de l'incroyable chance de vivre.
Depuis, quand un mec tremble, j'ai envie de le réchauffer

4) Pas de victime à déplorer

La jeune fille appelait sa mère, son père, le collège, son petit copain, que sais-je ? Elle parlait à son portable. Je me demandais si elle n'avait pas froid, assise sur le goudron.
Nous avons ramassé ses affaires, attendu les pompiers, déplacé son scooter Peugeot orange et son sac de collégienne*, attendu les pompiers, fait signe aux voitures de s'écarter, attendu les... non, les pompiers arrivaient, un seul, venu d'une intervention toute proche, puis un camion. Nous avons fait la circulation ; les pompiers ont dit qu'ils emmenaient la jeune fille. Entre temps, son petit ami et ses parents étaient arrivés - la mère en voiture, bien habillée, venant de la ville (avait-elle un mini 4x4, commerçante bourgeoise ?). Le père à pied, je crois. Je me souviens avoir pensé, à voir son visage, que c'était plutôt un beau-père, et pas forcément un type honnête. Oui, il était brun et bronzé, et j'ai peut-être été victime de préjugés oculaires ; mais sa façon de me répondre "C'est vous le papa ?" était un poil en retard, un poil décalée. Il na'vait pas l'air très inquiet, très concerné non plus.
Aucune importance. Le monde pouvait, comme la circulation dans le faubourg Bonnefoy, reprendre sa marche ; et moi repartir, le coeur léger.
J'ai pensé que les 2-roues étaient des dangers évitables.


(*au fait, madame l'assurance, dans cette direction il n'y a que deux ou trois collèges, dont un seul à mon avis impliquant que l'on emprunte le matin le Faubourg Bonnefoy en remontant vers l'Union)

5) Quelques temps plus tard

Je n'ai pas reconnu sa voix au téléphone ; calme, posée.Il m'a dit qu'il conduisait la Peugeot.
Je n'aime pas les 406, ça fait patron de droite.
Il m'a dit que la jeune fille était montée dans le camion des pompiers, ce matin-là, et que lui-même était reparti en voiture.
Je me demande quand ses mains ont cessé de trembler.
Et puis la jeune fille est descendue du camion de pompier. Elle est partie, avec son père et sa mère. Qui ont eu la délicatesse de ne donner ni leur nom ni leur adresse.
A cause du malus, je suppose. A cause des flics, ou des pompiers ? A cause d'une éducation déplorable, peut-être, d'une façon de chier dans la main que nous leur avions tendu.
Ou peut-être, si j'osais croire au monde, à cause d'un simple oubli.

6) Voilà, madame l'assurance, 

ce que je vis, ce lundi 30 novembre, en accompagnant mon fils à l'école.

Heureusement, il n'y a pas eu de blessé - sauf notre confiance au monde, et peut-être le portefeuille d'un patron de droite.
Que tu me demandes un témoignage pour ça, tu t'en rends compte, ça me fait plaisir. Les textes administratifs sont les textes qui perdurent le plus, je crois (c'est ce qu'indique le nombre élevé de requêtes menant à mon blog avec les mots "demande de recours grâcieux, ou les serments de Strasbourg, ou les archives des procès dans les petits villages).
En revanche, pour ce qui est de la hausse des tarifs, ce ne serait fort facile de la mettre sur le dos d'un couple de malhonnêtes, elle plutôt mignonne, grande, mince et brune (elle ne chantait pas) et lui, petit et brun, l'air suspect.



7) Une formule de politesse qui traduit à la fois mon respect de la chose écrite, de votre compagnie d'assurance et des rapports humains,

Et des bises,
vôtre.


PS : Je t'envoie quand même une attestation d'identité.
PPS : Tu as un joli nom, mais il ne faut pas agrafer excessivement les papiers à remplir et les enveloppes de retour, ça déchire tout...

8) Et une autre partie de moi, pendant ce temps, vient de réaliser

Super. Je viens de dénoncer une gamine pour qu'un type de droite se fasse rembourser des dégâts sur sa voiture de fonction. Tout ça parce que le père de la petite avait une tête qui ne me revenait pas.
C'est chiant, parfois, la morale.

12.12.10

908 - Et le jour fut dimanche

je nous vois encore
1) Oublis

Sauter à la ligne
Des bras des bites qui t'attendent, tendus, ouverts
Le coeur, le coeur
Le cul le coeur
Range
L'inassouvi de ton ventre, ta maison
Range
ton orgueil ta peur d'être
singulièrement commun
Range
ta cour ton coeur ta cohorte
Les animaux dans tes entrailles
Dans la cachette du cerveau la grotte
La caverne
Le corps qui trompe et se tend
L'attente

La neige, le coeur pur,
Le cul pauvre
Le cadre qui découpe l'image sur le monde

Un paquet de cigarettes portant la mention
_______________________________________________
I
I   SMOKING CAN CAUSE A LONG AND PAINFUL DEATH
I_______________________________________________

Well, sometimes life is a long and painful death.


2) Radioscopie

Des cheveux, mais en dedans,
Yeux de miraculés, sur le chemin de Damas
Cerveau bouillant de l'avant / masque nasal sur le visage
Cou tendu, gorge (gorge serrée toujours)
poitrine épaisse recouverte
sternum / fendu par le glaive (gladium, pilum)
estomac et bas-ventre aux abonnés présents
cuisses lourdes
genoux (moi, toi et moi et reliés)
genoux sans commentaire
mollets jarret d'acier beau coq sportif hommasse

silence sur les pieds

Et la tête, alouette ?



3) N'en rajoutons pas

Peut-on tuer quelqu'un par excès de considération ?
L'éditeur est-il un bouc lubrique ?
L'auteur se prend-il pour de la merde ?
Et le livre, le livre viendra-t-il ?

4) Demandez le programme

Sauver Emmanuelle Urien.

Et sinon : dernière maquette de LoFi, chronique de droite, scénarii, romans épisodiques,
accepter le fragmentaire,
jouir de la vie.

5) Une liste des choses à (ne pas) faire

Jouir réjouir jaillir régaler excuser éjaculer
brûler se tendre
cracher sur aimer
se prendre pour  d(i)e/u/x
vouloir, voler

suivre la ligne droite de
la courbe du désir

L'adverbe trop signe la mort

s'autodétruire.

écrire
(attention, cet auteur s'autodétruira bien vite)

6) Encore une façon de la tuer
ou de la rendre plus forte
Rendre publiques nos lettres d'amour.

11.12.10

907 - Ouvert pour Noël (jusqu'au dernier moment)

Pour regarder la mer
1) Ne pas se fier aux mots

C'est qui, ce Noël ? Encore un garçon un peu louche ?

2) Idées cadeaux

Il déserte, de Régis Maynard - la trajectoire tangentielle d'un fils du Tang (la boisson, pas l'empereur) et de Sue Ellen Ewing, entre cité ouvrière et supermarché. Un peu comme du René Fallet (période le Beaujolais Nouveau est arrivé) ou du Houellebecq anar qui se marre. Nouvelle maison d'édition qui démarre. Et un site qui tue.
Passé ce matin dans deux librairies - pas ces hypermarchés du livre où aucun ouvrage n'a la force de te faire signe, juste une boutique à taille humaine. Retrouvé cet étrange essai intitulé Petit traité du jardin ordinaire - une méditation sur le jardin, l'espace, nos attentes artistiques et métaphysiques. Et la mort des êtres aimés, comme des fleurs. Acheté Tomates, de Nathalie Quintane, dont le début m'a scotché dans le métro. Une écriture multiple et profonde comme les graines de tomates - vers le fruit, vers la fleur.
En parlant livres, CosmoZ de Claro m'est un poil tombé des mains - oui, un cyclone, oui, le magicien d'Oz, mais, euh... et la place du coeur ? Enfin, ça fait un chouette cadeau pour ceux qui aiment les écritures cannibales.
Histoire de finir sur une note plus égomercantile, il y a, une par une, les nouvelles d'Emmanuelle Urien chez In8, des livrets carte postale chez DNSB et même (c'est la nouveauté) des reproductions des illustrations de ce blog. En discuter avec moi par mail si jamais.

3) Reprenons les menaces
Edite-moi, ou je tue cet auteur.
Ce sera simple. Je révélerai tous ses secrets, ses gestes intimes, ses contours, ses arômes. Tout de ce qu'elle est, pense, dit, cache, renie.
Quand j'en aurai fini, il ne restera plus rien d'elle.
Ahahahahahhah.


4) Les rires sardoniques, c'est nul à écrire.
Mais ce n'est pas le plus compliqué. Ecrire l'admiration, l'importance de la rencontre (surtout si on doute de sa réciprocité), l'impression de l'autre sur la pâte de notre mémoire, les ramifications dans nos richesses intérieures... Même sans compter la part d'égocentrisme dégoulinant, ça peut être ardu.

5) Mes conseils pour écrire


Alors déjà, prendre un stylo. Ne pas se demander si c'est le bon stylo.
Ah zut, déjà un doute qui taraude.
Poser le stylo.

Accepter le doute. Inspirer. Noter ce que fait le corps - s'il est tendu, nerveux, fébrile, empressé, hésitant, enthousiaste, éperdu, chaud, froid, vert (vert ?), vivant, moins vivant presque l'un ou quasiment l'autre

Respirer

Penser qu'on écrit de la merde et qu'on chie de la littérature


Mâchonner le stylo - le reposer.

Se dire qu'on n'aura jamais le temps

Commencer une phrase à haute voix
se dire que peut-être mais

ET LÀ, BONDIR.

La noter l'écrire

inspirer, expirer

Laisser couler le reste du texte (depuis les pieds les genoux les cuisses le bas et le haut ventre, le creux autour du coeur et puis le coeur lui-même, la gorge, le nez, tant pis pour le cerveau il nous a déjà été utile)

Se demander si on a pris le bon stylo

Envoyer le texte à son destinataire
S'il n'en a pas, l'avaler.

Et recommencer.

10.12.10

906 - Tous les moyens sont bons

1) J'ai peur
at your feet
de la mort de la peur
de ce qui coule de mon ventre

2) SF
10000 ans plus tard, le scribe T'zzeettyr s'amusa à éditer une anthologie du fragment.


3) Un peu à l'étroit
dans ce blog. Il craque aux entournures.

905 - Construction mentale

1) Quelques raisons de la tuer

1.1 Yoko Ono est vivante
John Lennon vachement moins,
Faudrait voir à rétablir l'équilibre.

1.2. Bertrand Cantat s'est reformé, et il vendra plein de disques.

1.3. Je l'aime à mourir. 
Et si avec ça tu ne chantes pas du Francis Cabrel toute la journée, c'est que tu es bien plus solide que je ne le pensais.

2) Conseils à un éditeur

2.1. Je vais buter la petite,
et son sang retombera sur tes pages. Ce qui est plutôt sale.

2.2. Tu as besoin de souffler,
Tu me l'as dit toi-même. Trop de choses, pas de temps, et du stress.
La solution ?
M é d i t e r, évidemment.
(Tiens, une ', quel heureux hasard).


2.3 Pour prouver que tu as du coeur,
Parce que si je demande à Quadratures, à Gallimard (pas le kebab, l'autre) ou In8, je suis certain qu'ils diront non.
Pense, voir assassiner leur noire pouliche les peinerait, sans doute,
mais ils s'en consoleraient au vu des retombées médiatiques.

3) Encore des raisons de ?

3.1 Parce qu'on pourra voir les courses de F1 à la télé
au lieu de passer nos dimanches au théâtre à écouter ses textes lus par un comédien.

3.2. Pour éviter qu'elle se tue à la tâche
Tu la verrais, comme moi, arc-boutée sur son clavier, à empiler les traductions alimentaires en rêvant de romans, tu te dirais qu'elle souffre trop. Et tu mettrais un terme à ses.
J'en demeurerais inconsolable, et m'épancherais de ma peine dans un long roman-confession.
450000 exemplaires, au bas mot.

3.3. Parce que j'adore le teasing
Tu as vu ? Rien de tout cela ne fait sens, malgré la construction irréprochable.
Mais tremble, carcasse : je vais bientôt révéler mon plan machiavélique

9.12.10

904 - Comme envie de

1) Pourquoi tant de n ?

Parce que tant de peur.



903. Une brève histoire de l'édition


1) Il s'appelait JF

Il fut mon premier éditeur. Chaud, rassurant, enthousiaste. Il me promettait merveilles et monts, voiture de rêve, nouvelle vie.
Au bout de quelques mois d'un Petit guide qui ne décollait pas, il brûla lui-même les derniers exemplaires restants, pour ne pas qu'ils tombent entre les mains de ses créanciers.
Je ne lui en voulus pas. Je le tuai simplement - un matin froid, du côté de Lille, une voiture l'a renversé et laissé pour mort sur le trottoir. On ne retrouva jamais le conducteur.

2) Elle s'appelait LN

C'était une femme double, complexe, entre féminisme militant et rêves de petite fille. Elle aimait mon style, j'étais fou de son corps et de son caractère.
D'imprimerie, bien entendu.
Elle me soutint longtemps, un peu comme une mère, guidant par ici, reprenant par là.
Puis je me mis à écrire des histoires féroces, et elle m'aima moins. Je m'écartai d'elle, décidé à la laisser vivre.
Cet accident qui lui est arrivé n'est pas de ma faute. En tout cas, on ne peut pas me le reprocher.

3) Il s'appelait PA

C'était un homme de chiffres ; sa fine moustache frémissait dès que les comptes passaient dans le rouge, et son oeil rond s'allumait d'étincelles lubriques dès qu'un auteur un peu sexy, un peu osé, passait près de ses griffes.
Il m'édita, je le confesse, avec ferveur et inspiration. Je ne lui en voulus même pas lorsque je me rendis compte qu'il détournait les millions d'euros de droits d'auteur qui provenaient de la vente de mes livres. Je ne lui en voulus pas lorsqu'il me refusa un manuscrit au prétexte qu'il était trop bon.
A l'image de la scène du parrain, je me contentai de déposer dans ses draps de satin rouge une tête de cheval (seulement métaphorique ; n'ayant aucun équidé sous la main, je déposai le crâne d'une petite fille qui avait croisé mon chemin). Il comprit le message et se prépara à publier mes extraordinaires nouvelles.
Las, la mort le faucha précisément à cette époque, incarnée, selon les enquêtes, par un autostoppeur qu'il eut le tort de ne pas laisser sur le bord de la route.

4) Barbe-bleue

Tu seras donc le quatrième. Je te confierai mes clés.
Malheur à toi si tu t'en sers.

5) Provocation

A l'heure même où j'écrivais ces lignes, je recevais un mail d'un éditeur, refusant un superbe recueil de nouvelles à quatre mains.

Très bien. J'ai voulu être gentil jusqu'à présent, on me montre que j'ai eu tort. Vous l'aurez voulu. Je vais m'en prendre à Emmanuelle Urien.

Je préviens : à côté de moi, Wrath est une baba-cool fumeuse de chèvres qui milite pour la paix dans le milieu de l'édition.

8.12.10

902. J'insiste









1) Du matin


Le soleil entre les arbres, chez F., ce matin,
La photo d'elle au soleil mélancolique,
Un chat à l'envers par ma fenêtre ouverte,

doucement trivial

2) Le plan

Si, si, je maintiens. Soit tu édites mon livre, soit je bute Emmanuelle Urien.

J'ai plein de bonnes raisons pour ça. D'abord, elle est belle terriblement, au point que je ne peux la saisir. Ensuite, elle s'est écrite assassinée par un homme à chapeau, dans son roman Tu devrais voir quelqu'un. Et puis, en termes économiques, ça nous fera de la pub pour mon livre.

Raisons personnelles, mystiques et économiques : déjà, un bon début.

3) Elsa triolisme

Ecrire, peindre, à la limite,
ça pourrait faire sérieux.
Mais jouer de la musique ? On sent bien le côté enfantin, brouillon, sans importance.

Et faire de la musique sonne trop banal, comme faire l'amour.
Faudrait que j'arrête, je suppose.
Mais l'envie.

7.12.10

901. Et alors ?


1. Procrastination
J'ai trouvé une nouvelle utilité à ce blog.
Il s'adresse à un éditeur, et il dit
Edite mon livre ou je bute Emmanuelle Urien".

Sinon, vous, ça va ?

2. Le problème du vous
C'est qu'il est multiple et unique à la fois.

3. Surtout ne va pas croire
Qu'entretemps, j'ai gagné et perdu, regagné reperdu, égaré éperdu,
Que des amis partirent
Arrivent des nouvelles
Que les choses sont
(comme elles le furent)
Belles, simplement.

4. Les liens, c'est important.
J'ai aimé, j'ai moins aimé,

Mais je n'en mets pas. Autant chercher par vous-même, si l'envie vous dit,
ou demander en commentaires,

Herman Dune, Régis Maynard Il déserte, La Teigne, Sylvain, Sylvain aussi, le bouquin "Cosmoz" de Claro, Aymeric de la Mouille, le sexe à plusieurs, le film "Le nom des gens", les éditions Harlequin, la patrouze galactico-numérico-artistique, le cabaret érotique, les spectacles de LoFi, les glossolalies, les lectures musicales, Facebook, ce qui s'est passé dans mon corps, mes tableaux, le rugby, les éditrices et leur regard, tout ce qui me manque, les mardis pour mon fils, les choses les plus importantes, mes petits secrets, la gourmandologie d'Odile, Petits exercices d'amour et de haine, la place de l'artiste dans la société, la place de la société dans l'artiste, savoir et connaître, dire des choses à propos des choses, la méthode grinberg, les prénoms, les belles rencontres...

5. Le mardi, c'est pour toi aussi

Depuis que
je te sais,
je dis plus facilement
Je t'aime

21.11.10

900. What else ?


1. Je vis encore
Puisque j'écris.

2. Ne rêvons pas
Ce blog ne renaîtra pas de ces cendres. Il est officiellement achevé depuis le n°899, donc vous ne lisez pas ce message. C'était simplement pour dire que

3. Des nouvelles
Sur ce blog.

28.6.10

0 - Ce qu'il reste


1) Conclusion et moralité

Voilà. Ce blog s'arrête ici. À moins qu'il ne commence, évidemment
(la radio chante J'aime les filles)

Presque 900 posts, c'est-à-dire presque 1000. Presque quatre ans, c'est-à-dire presque cinq.

Des mots. Des poèmes. Des délires. Des illustrations. Des rêves de gloire, de grandeur, d'art, de beauté.
(la radio hésite, crachote)

Quelques moments sympathiques.

Presque cinq ans de bouts de vie, est-ce que ça fait une vie ?
Est-ce que ça change ?

C'est à voir.

(la radio s'est éteinte).

Étrangère, étranger, qui passe ici,

Sache qu'une personne disant "je" pour parler d'elle a existé quelque temps, sur cette non-planète que sont les blogs.

Sache que des sentiments des émotions des visions des pensées des bulles de gaz et de liquide l'ont traversée, incidemment.

Sache qu'en remontant dans ces colonnes, tu sauras si cette personne aurait pu être ton semblable.

2) Acknoweldgements

L'auteur tient à remercier, dans le désordre,

- ses parents et amis et cousins et potes et amantes et visiteurs qui ont fait de lui ce qu'il est (c'est donc un peu sans doute de leur faute)
- E. qui le maintient si souvent sur la route,
- W. pour qui il crie si souvent dans le désert,
- O. pour les miroirs
- le futur, qui arrivera, c'est certain.
- les blogueurs en général, pour ce qu'ils donnent sans retenir.

3) Pour la petite histoire de la postérité

D'autres blogs/sites/projets sont en cours, nous nous y retrouverons peut-être ; celui-ci restera affiché à cette adresse aussi longtemps que nécessaire - mais à quoi ?

4) Ce coup-là...

... Il n'y a pas de 4.

26.6.10

898 - En finir, mais comment ?

1) Mettons

Alors tu décides que tu en as assez dit. Que ce qui pourra venir méritera, au pire le silence, au mieux d'être mûri.
Que

25.6.10

897 - Vendreri


1) Chrnonqieue d'un suicide annonncé

C'est décidé, j'arrête cce blog, rtès vite. MAis avant, je vais le saborder, histoire de fbien en profitier.

2) Ce que je déteste en toi

La liste est longue, mais je dirais ton immaturité, tes peurs petites et grandes, tes hésitations, tes atermoiements.
Ta prétention à être quelque chose, ta prétendue intelligence, ta stupidité évidente, ton inculture, tes passions, ton manque de passion.
Ta sexualité débridée, ta frigidité, l'insolente facilité que tu affiches parfois. Le fait que tu te plaignes constamment de ton sort.
Ta volonté malgré tout et toujours de trouver à toutes ces horreurs des côtés positifs. De te faire croire que c'est ton humaine condition.
Ton envie d'analyse, de réflexion, contrebalancée par ta tendance à la grosse blague débile, mais aussi par la crainte en sous-main d'être jugé, de dire une chose qu'on te reproche.
Ton incapacité à garder un secret. Ton incapacité à parler.
Ta prétendue sensualité à fleur de peau. Le fait que tu sursautes quand on te touche.
La façon dont tu es incapable de t'occuper de tes enfants, et incapable de ne pas t'occuper d'eux.
Ta fascination morbide pour ton nom ton nombril ton égo ton image
Tes prétentions artistiques, ton envie d'être un génie, ta haine des génies,
Ta conscience, ton inconscience, et même la troisième partie de ton cerveau/ventre/sexe qui cherche toujours à dépasser les dualités - ton instinct, destructeur pour les autres.
Ton corps, quand il s'affale
ton corps, quand tu le veux puissant,
ton corps, quand tu l'abandonnes (même si tu ne le peux pas vraiment)
La tension de tes épaules la gêne dans tes mouvements
Ton odeur tes odeurs
Le fait que tu t'appelles le fait que je m'appelle le fait que nous nous appelions,
ton incapacité à rompre, comme à t'engager,
ta musique, tes histoires,

non, j'aime bien tes histoires,

ton arrogance quand tu prétends rester en équilibre, marcher sur une ligne, survoler les débats.
Ton obséquiosité, le fait que tu rampes devant tes amis mais ne laisse personne t'approcher.

Le fait que je te connaisse si bien.
Le fait que
je te comprenne.

3) La blague de la semaine

Prêtée par un Fred comme je les aime : le comble de l'avarice ?
Partir en Thaïlande avec ses propres enfants.

4) Les dessins et les photos et les illustrations

de ce blog me font suffisamment honte pour que je les exhibe au jour le jour.

5) Un avis sur le foot la politique le monde les grèves et tout ce qui s'ensuit

Et si on arrêtait les conneries ? Si on s'écoutait les uns les autres ? Si on construisait le monde, non pas pour nous, mais pour un tout petit enfant qui naîtra, mettons, sur un parallèle quelconque en 2142, quand nous serons tous morts (et cela n'est qu'un battement de paupière du temps).
Il serait temps de mettre les choses en ordre. Cet enfant-là voudra-t-il connaître les noms d'un sportif d'un ministre d'un prêtre d'un artiste, ou simplement respirer un air pur et boire en toute tranquilité ?

6) Watch me, I'm Dying

Un bon titre de blog, non ?

7) Rubrique "à vendre"

Artiste multicarte accepte toute commande, prestations bordéliques, prix en rapport.

8) Mais en fait ce que je voulais dire

Je t'aime, toi.


Mohair (Drawing bits)

18.6.10

896 - Vendredi vêtement


1) Livraison

Solo rock, roman bilingue, paraît aujourd'hui. Troisième bébé avec les éditions Talents Hauts. Résumé ?

Guillaume, adolescent en rupture de ban, traverse clandestinement la Manche pour assister au concert de son idole, un guitariste de rock. Celui-ci est au top de sa carrière mais se reproche de lui avoir sacrifié son fils unique. Dans une tentative d'expiation, il décide d'offrir sa guitare fétiche à un fan. Leurs routes vont se croiser.

2) Tired of


Advertising, shouting uselessly.

3) La blague de la semaine

C'est un type qui fait un blog. Au début, il est persuadé que cela le rendra célèbre ; ensuite, que ça lui apprendra à écrire ; ensuite encore, que son écriture redresse les torts le monde, répare les silences ; encore ensuite, il se dit qu'il le doit à ses lecteurs.

Un jour il dit qu'il ne cherche au fond qu'une reconnaissance, qu'il n'obtiendra jamais complètement.

Alors, il se met à écrire.

16.6.10

895 - Landing




1) Avant le silence

Voilà. Nous avons terminé cette traduction pour avant-hier - un gros morceau, genre Twilight. Cela faisait une bonne semaine que nous cravachions tout deux. Nous avons (re)trouvé ce goût, que l'on suppose à nos aïeux, du travail achevé, poli, étymologiquement parfait.
Oh mon dieu. S'agit-il donc, dans mes rapports avec toi, de nous parfaire l'un l'autre ?

2) Belle allure

Et nous courions, haletants, le coeur et le ventre tendus vers l'arrivée ; les petites choses alentour nous paraissaient importunes, trop lourdes à supporter, indignes d'attention (ou, si elles en étaient dignes, importunes à cette heure). Puis ce fut l'arrivée, ce fut la délivrance.
Le plus dur, à présent, est de laisser retomber le pouls sans avoir peur du vide.
Glander, c'est plus qu'un travail : une oeuvre.

3) Nouvelles du front

Mes cheveux poussent.

4) Je saurai me retenir de m'excuser pour la blague qui précède

Voilà que, comme malgré moi, et malgré les doutes qui me restent, je fais quelque minces actions pour que LoFi (Radio de son prénom) existe sur scène. Prévoir trac, extase, redescente.
À moins que je ne trouve la béatitude nécessaire, la tranquille euphorie de l'échange.
Ce qui supposerait de repenser encore cette histoire de confiance.

5) Signature

Les images ci-dessous
Parfois j'hésite

Oh tant pis une autre fois (à cause de tes mains / ce truc / sur mon épaule)

Ecrire sans vexer, est-ce possible ? Être à part à distance ?

Trop tard.

Redescente.

6) Experimental

Ci-dessus, un numéro qui a failli s'écrire.



Illus : Absence (Drawing bits), ep

14.6.10

894 - Réflexions faites


1) Bleus

Je me souviens d'eux. Ils étaient deux. Les meilleurs, c'était une évidence. Toujours dans la surface de réparation, toujours devant, toujours dribblant la balle au pied. Semant la pagaille parmi les défenseurs, tirant, toujours, vers le but.

Puis au choix ils levaient les bras ou se roulaient par terre, jetaient des insultes à l'entraîneur à l'adversaire, des reproches au partenaire qui aurait dû mais n'avait pas ; ils fouillaient dans leur poche et en sortait un portable, se dandinaient sur la pelouse, invitaient les spectateurs à les admirer.

Leur bêtise, leur incapacité à penser une histoire autre que "on dirait que je serais le meilleur du monde et que je réussirais tout", les parents qui les accompagnaient (cigarettes voix fortes survêtement commentaires désobligeants sur le reste de l'équipe) ; leurs attitudes calquées sur la non-réalité des images télévisuelles - il ne leur manquait au fond que le ralenti - criait la médiocrité, la petite commune misère.

Ils avaient six ou sept ans ; ils jouaient dans un club de foot de quartier, n'avaient pas la moindre idée de ce qu'était le respect pour un entraîneur, un adulte, un coéquipier. Pas la moindre idée de ce qu'était une équipe.

Ils avaient six ou sept ans, peut-être moins, mais déjà des adultes au regard sûr autour d'eux se rengorgeaient, détectant, dépistant qu'un jour peut-être, un jour sans doute, ils seraient des grands.

Et ils avaient raison, sans doute. Si on parvient à laisser monter en graine des bébés capricieux mais rapides des jambes, on obtient, semble-t-il, plutôt que des personnes, des footballeurs.

2) Justice

Puisque notre cerveau, prompt à l'emballement, se projette une image où la blessure de nos corps ou nos âmes est annulée, invalidée, réparée, nous courons - parfois toute une vie - après la notion de justice.

À l'inverse, il peut nous paraître, certains matins de creux dans le ventre, que le monde, Caliméro, est vraiment trop injuste. Qu'on n'arrivera jamais à, étant donné nos handicaps de départ. Et ce n'est que justice.

Ainsi, me projeter dans l'échec me permet de me sentir tout à fait à l'aise, tout à fait réparé - ou au moins justifié.

Pratique, non ?

3) Ca m'énerve

En tant que membre du gouvernement de mon coeur, je bénéficie du droit à une retraite d'un précédent mariage, des indemnités de quelques missions d'exploration amoureuses, ainsi que du traitement pour mon couple actuel.

C'est beaucoup, je dois l'admettre - même si je peux le justifier par mes nombreuses responsabilités (et ce bien qu'au cas où celles-ci seraient engagées, les tribunaux, je le sais, se montreraient d'une grande clémence).

Aussi, je m'engage ici à renoncer à au moins l'un de ces revenus, à condition bien entendu qu'on promulgue une loi. Ce qui me laisse quelques mois à profiter de l'ensemble.

Je me poserai ainsi en exemple pour tous ceux à qui la conjoncture impose un effort de rigueur sur leur coeur.

4) Nouvelles du trou

Il y avait hier à B., ce village au coeur percé ouvert, une nouvelle rue, une ancienne maîtresse qui souriait de nous voir, des lapins apeurés et des couleurs d'orage. Allez savoir pourquoi, j'ai regardé les maisons disgracieuses, dépareillées, parfois prétentieuses - et je leur ai trouvé un certain charme.

Le plein de campagne fait, le passé rétabli peut-être, nous repartons à l'assaut de la grande ville.

5) Narcissisme et politique

Vu hier dans un magazine la photo d'un ministre avec des crampons et un maillot bleu ; ce même ministre annonce ce matin, tout en douceur, la réforme de l'âge des retraites - discutable par la suite, évidemment, et équitable, et nécessaire, ô combien.

Faut faire corps derrière l'entraîneur. Il nous mène à la victoire, de toute évidence. Tiens, là, derrière nous, sur l'écran, but de Machin. Dire que nous avons failli le rater.

Ça fait quand même beaucoup de mépris pour une seule semaine.

11.6.10

893 - Friday, friday, friday : ouééééééééééééééééér !


1) Marathaf

L'étrange plaisir que nous prenons à boucler nos traductions comme des dossiers brûlants, les fesses coincées sur nos fauteuils et les yeux carréfiés à force d'écran.
Nous jouons à travailler.
Plus d'un trader y a laissé des plumes ; les traducteurs, heureusement, volent dans des cieux moins pollués.

2) Sans nouvelles de


Du coup, apparait plus supportable l'absence de retour sur tel ou tel projet, mots, musique ou dessin - de même que l'avalanche de nouvelles idées à explorer et d'anciennes à poursuivre.

Il s'agit donc, Dr House, soit d'une addiction au travail, soit d'un apprentissage pas à pas d'une vie plus sereine.

3) La joke de la semaine

Parce qu'une héroine de roman n'en peut plus de serrer les mâchoires et de sentir son coeur battre à tout rompre dans ses tempes, je retrouve cette blague idiote qui m'enchantait enfant (et fait rire mes Petits, tous les quatre) :

Un français arrive pour la première fois à New-York.
A l'aéroport, il commande un café ; on lui sert une coupe d'un demi-litre. Il manifeste sa surprise ; ce à quoi le vendeur rétorque, avec l'accent :
'Ici, en Amérique, tout est vraiment très grand'.
Le café avalé, notre français hèle un taxi ; c'est une limousine à 8 essieux qui s'arrête devant lui. Comme il proteste qu'il n'a pas besoin de tout cet espace, le chauffeur lui lance en grommelant : 'Ici, en Amérique, tout est vraiment très grand'.
Pareille mésaventure lui arrive lorsqu'il commande un hamburger - une énorme chose qui remplit toute une assiette et s'élève au-dessus de sa tête - achète un T-Shirt, qui lui tombe aux genoux, ou se trouve un hôtel - cent soixante-dix étages, des chambres single de 95m2 et des lits où l'on tiendrait à douze.

Avant de rejoindre sa chambre, le Français demande le chemin des toilettes. On le lui indique, mais il ne comprend pas bien et se trompe ; par mégarde, il tombe dans la piscine de l'hôtel.

Alors, il hurle : - Ne tirez pas la chasse !

Oui, pardon.

4) Ne lisez pas, c'est pour mes fils

J'imagine que tu lis ces mots dans un espèce de futur déshumanisé - sans moi, peut-être.

J'imagine que tu m'as, avec le temps, détesté, rejeté, haï, retrouvé, oublié, repensé, et puis aimé sans doute, aimé peut-être ; que tu as fini par comprendre quel hasard étrange ç'a été que je devienne ton père, et toi mon fils. Cette aventure improbable qui a occupé une bonne partie de nos vies.

Tiens, écoute. Je voudrais juste te rendre un petit truc. Qui doit être à toi, je suppose, ou à nous.

Un petit luxe.

Hier, nous sommes sortis tous les deux dans la rue. Tu tanguais, portant ma casquette Stade Toulousain ; tu me tenais la main, tu me parlais, nous nous amusions. Nous sommes entrés chez le boucher, le boucher du quartier. Et nous avons connu le luxe. Le luxe de choisir une jolie viande pour nous fabriquer un plat (c'était ton premier steak tartare), le luxe de refuser l'excès, d'en prendre juste assez, presque au gramme près ; le luxe de réfléchir à ce que j'allais cuisiner le lendemain, à ce qui ferait plaisir à E. ; le luxe de plaisanter, de sourire, de tendre la monnaie au type assis dans la rue et qui avait l'air d'avoir faim ; le luxe de commenter le monde autour de nous, de détailler une recette ; le luxe que je te refuse d'entrer voir au tabac s'il y avait de nouvelles cartes à acheter, et que cela nous laisse sans colère ; le luxe d'un rayon de soleil, avant d'entrer dans la maison. Et ce matin, tu m'as embrassé, sur le pas de la porte.
Tu entres en 6e, l'année prochaine, et j'apprends à me souvenir de tout ce que j'ai haï dans cette période, pour t'en libérer. Tu entres en 6e l'année prochaine, tu grandis chaque jour, deviens beau, vraiment, supportes avec courage les petites vexations de l'appareil dentaire ; restes rêveur, bravement. Et le matin c'est toi qui décides d'accompagner ton frère à l'école, parce que ma cheville est entorsée. Si grand, déjà, comme pour compenser mes petitesses.
Mais c'est ce geste, ce mouvement de la tête - vers moi et vers E. - tes lèvres sur ma joue, nos mots sur le pas de la porte, passe une belle journée, amuse-toi bien, à ce soir, mon trésor. Le luxe de la tendresse, de la complicité, du partage.

Tu es, aujourd'hui encore, l'abondance de beauté dans ma vie. Où que tu sois devenu, avance avec confiance. Tu n'as pas rendu ma vie belle : tu m'as donné la force d'en faire une vie.

5) New skin on the blog

Pas ma faute : c'est aujourd'hui, auourd'hui seulement que blogger propose des nouveautés. J'essaie. Mignons, ces tons pâles. Un peu efféminés, peut-être ?
E tout cas j'aime beaucoup.

10.6.10

892 - The way it works


1) Truc bête

Tu le sais, pourtant. C'est autre chose qui m'agace : un détail, une anicroche, une tierce personne. Un simple encombrement de mes voies neuronales que je juge importun.
Et c'est vers toi que je me tourne, ta main que je mords, sur toi que je lance le tranchant de ma voix.

Aujourd'hui, tu me retournes, d'un geste vif de tes mots. Et je m'arrête, je chancelle. M'aperçois de l'infantile, du superflu de ma colère.

Ainsi allons-nous, nous exhortant encore l'un l'autre à grandir.

2) Reading

Lectures aujourd'hui. Celle-ci un peu vite, celle-là un peu longue ; celle-ci lancée comme une bouée depuis le rivage, en cabotinant. Et tu me rattrapes, mon filet.

Je me souviens toujours de la perfection que nous atteindrons dans mes rêves. Tu sais, celle qui empêche, sinon d'avancer, du moins de jouir.

9.6.10

891 - Dans les interstices


1) Ménage de printemps

Il était temps, non ? Cela dit, ne serait-il pas temps, plutôt, de changer de peaublog ?

2) Juste une image

Un lac aux berges rectangulaires, une allée d'arbres au tournant, le bleu des feuillages ; je rejoignais une amie à une terrasse, j'allais changer de métier, quelque chose se tenait droit dans mon dos et mon ventre. J'étais heureux.

Cette image refait surface ce matin de ma mémoire, alors que le ciel est grand gris et que je me visse au siège pour finir un boulot dans les délais. C'était il y a quoi ? Cinq ans peut-être ? Il n'y avait pas encore de blog, pas encore de nouvelle famille. Juste un sourire et de la liberté.

C'est drôle. Une fenêtre de bonheur dans la fenêtre sur la rue, au milieu des écrans et des cadres.
On finirait par penser en rectangles, tiens.

3) Petite blessure narcissique

Gala hier annuel de la danse de la petite de cette presque famille que nous recomposons.
Agacement de l'agacement de l'embourgeoisie autour, un peu de prétention ; s'attendrir aux premiers pas, découvrir les grâces qui s'affirment, le plastique des corps ; penser que tous les parents munis d'écrans inextinguibles volaient, jalousement à leur profit, un peu de l'obscurité générale.

Puis, de retour dans ma cave, retrouver le geste de mon direct du droit (qui fonctionne encore, puisqu'il abîme un peu les vestiges de ma cheville gauche). Il faut dire que Vrai Père me réserve toujours son regard de dédain, refuse même de répondre au mot bonjour.

Tout va bien. Je suis blessé, en colère, je le trouve méprisant, stupide, borné (et je le comprends je suppose) imbécile. Et mieux encore, mieux surtout : j'ai cessé de chercher ce regard dans les yeux de ses enfants - nos enfants, aussi.

Tu veux que je te dise ? Les ex ont toujours la bonté de nous rappeler pourquoi ce sont des ex.


C'est drôle.

4) Reality tchèque

Je te le jure, par la fenêtre, j'entendais une voix hésitante chanter La Claire fontaine - et quelqu'un la reprendre en sifflant.

Dire que j'ai tout ça à finir avant de me mettre à jouer...
À moins que jouer m'aide à travailler mieux ?

8.6.10

890 - Vieux grands chevaux

1) Gambling man

La radio me susurre que le gouvernement vient d'autoriser les jeux de hasard en ligne
pour encadrer les sites illégaux.

Passe-moi le cannabols, Michel, qu'ils le légalisent au plus vite pour que je ne me fasse plus mal.


2) De bois

Hier, un ministre disait que l'important, c'était que la nation soit
unie derrière son équipe - non que celle-ci se dore la couenne dans un hôtel pour rentiers, probablement avant de se faire battre en vingt-deuxièmes de finale par une sélection de pingouins de la Terre Adélie.

Sans déc, ils en sont là ?
Pas le moment de regarder la ligne bleue des Vosges.

3) Procrastination

J'ai tué LoFi, les Gmörks se bloquent sur une vignette pour quelques jours, je n'ai pas mailé deux projets de pièces et trois idées de scénar au moment même où ils germaient dans ma tête, et, pire encore, nous avons enregistré hier avec Grizzly Marie un morceau que nous n'avons pas diffusé immédiatement sur nos blogs et myspace.

Pour en finir avec l'éjaculation artistique précoce ?

4) Tu as remarqué quelque chose ?

Un petit essai de déco... Pas mal, mais ça manque de fleurs (et il y a trop de conjonctives dans les phrases ci-dessus, mais c'est mardi et je n'ai qu'un pied).

6.6.10

889 - The chauve must go on


1) Puisque

J'y serais bien resté, moi, à ce 888. Le côté infini, perfection, achèvement... et puis se taire à jamais.
Oué. Sauf que j'ai commis un meurtre, et il faut bien que je m'en accuse dans ces colonnes. Sans quoi, à quoi rêver d'aveux, toujours ?

2) Insupportables contraintes

Quand il y a un 1, il y a un 2. C'est comme ça, je n'y peux rien, moi.

3) Je vous demande pardon

Je vous demanderais bien la réponse, mais j'ai encore oublié la question.

4) Tant qu'à s'en poser

Cette gmörkerie en couleurs.

4.6.10

888 - Soif et jardin


1) Aveu presque suprenant

Depuis quelques jours mon mail ces commentaires mon envie de projets (et mon ventre je suppose) se tarissent ; depuis quelques jours je m'étrangle sur ce besoin de reconnaissance, cette soif qui nous pousse et par définition ne saurait être satisfaite (sinon par le trop-plein l'excès l'avalanche, l'enfouissement le dégoût - mais resterait tout de même insatisfaite). Je l'entends qui tambourine sous mon coeur dans mes tympans à ma fenêtre, qui bourdonne dans ma chambre ma maison - notre maison, car Elle n'est pas en reste, je suppose.
Et ce malgré l'évidence : le soleil, les sourires, le travail qui m'amuse et que j'aime (même si personne ne vient me dire que j'ai les plus beaux seins du monde).
Comme s'il manquait quelque chose, comme s'il manquait l'amour - dont je reçois pourtant, et espère donner, des émissions quotidiennes à hautes doses.
Putain, mais où je l'ai rangé ?


2) Commençons les recherches

Je fouille du regard la courette : une table-tableau, une échelle, une chaise un miroir, un barbecue en fer forgé impraticable, qui sert de socle à des fétuques dans des pots pastels ; le cordon entortillé du jet d'eau derrière le camélia, le bambou, le géranium qui joue à mettre du rouge partout sur le jaune et le violet ; les sièges bas dont j'ai coupé les jambes pour qu'ils soient des fauteuils ; l'herbe que nous avons semée pour un carré de gazon à la fraîche sous le figuier, la bêche qui pend accrochée à l'arbre, le meuble bas où poussent en vrac une belle sauge (car de quoi mourrait-il, l'homme qui a de la sauge dans son jardin ?), des pieds de coloquintes, de canabols et de tomates ; les aromatiques, la table, l'ordinateur, mes mains. Il y a même, et je l'écarte, un cendrier qui m'empuantit la vie, et un coussin argenté, reste d'un cubi de vin rouge. PLus le feuillage des troènes, leur odeur douce et leurs fleurs qui jonchent tout ce qu'elles peuvent malgré le balais, et au fond l'atelier.
Ouéch, mais c'est gavé d'amour, mon frère. C'est comme ces jeux d'optique où tu dois distinguer en écartant les yeux ce que tu ne voyais au départ.
Vas-y, prends ton temps, regarde.


3) Easy go

Ce serait un jour, par exemple, à reprendre la cigarette, l'alcool, le canabols, le polysexe, la dépendance. Ca ne changerait rien, je suppose, mais ça déplacerait le centre de gravité vers le moyeu de la connerie.

4) La blague de la semaine

Offerte par Oh! au passage -uniquement pour ceux qui ne lisent pas les comms :

C'est un chien qui autour d'un réverbère.
Chic, un cul !
Merde, c'est le mien.

Illustration parfaite de la déprime circulaire.
De la joie aussi, je suppose.

3.6.10

887 - Proxima du centaure


1) What's that

C'est quoi ce truc qui me retient qui m'enchaîne
M'empêche d'aller
Visiter Proxima du Centaure
Ou le supermarché le plus proche

C'est je le suppose
Le bris de ma cheville
Le souffle au coeur de mon coeur

La confiance en le jour comme
Une girouette de bronze dans la tramontane

Et je répare inlassable
Je renoue les cordages ravaude les filets
Les yeux sur le large guettant la mer étale
Le bleu et le violet.

2) Bin qu'est-ce que j'ai dit ?

Des hauts et des bas, des impulsions et des rechutes, des lectures et des envies qui guident les mots à s'agencer de la sorte, je ne saurais dire grand-chose. J'essaie parfois, quand ils s'écrivent, de savoir ce qu'ils me racontent - espérant sans doute qu'ils réparent ce que j'ignore être blessé.

3) Décode, petit

Des émotions d'hier, je me rappelle un vague agacement que ce nouveau blog et son écriture fine soit qualifié de "lien le plus déprimant du monde" par Miss Übersex 2010 ; cette espèce de panique ironique quand il s'agit de travailler au milieu des enfants (d'autres y arrivent, pourtant)

Les mains sur le clavier se trouvent pile poil entre le ventre et la tête. Voilà à quoi me sert l'écrivage.

4) Et sinon ?

Et sinon la courette se porte comme un charme ; mon prochain post, si j'y parviens, je l'écrirai de là-bas.

2.6.10

886 - Mon jardin, pourtant


1) O-pérer

Devenir père.
Pèrer ?
Pérorer ? Opérer ? Pérenniser ?

Ou perdre ?

Fa raconte ce moment. Et celui qui suit, celui des ombres du jardin.
Pour ma part, je me souviens de la pleine lune sur la nouvelle maison, et de ce qui se disait obscur, insupportable.

Anton et Zadig marchent debout. Ils vont seuls au parc, ont leur clé de la maison. Me répondent sur le ton de voix que j'utilise.
Crient souvent, se disputent. Laissent pousser leurs cheveux leur charme.
M'apprennent à m'apprendre chaque jour.

2) Courette

Désireux de mettre de l'ordre dans le monde, le sage commença par mettre de l'ordre dans son pays ;
désireux de mettre de l'ordre dans son pays, le sage commença par mettre de l'ordre dans sa région ;
désireux de mettre de l'ordre dans sa région, le sage commença par mettre de l'ordre dans son village ;
désireux de mettre de l'ordre dans son village, le sage commença par mettre de l'ordre dans sa maison ;
désireux de mettre de l'ordre dans sa maison, le sage commença par mettre de l'ordre dans son coeur ;
pour ce faire, il s'assit dans son jardin, et attendit qu'il se passe quelque chose.

3) Signes everywhere

Méfie-toi de ce que tu désires, car tu l'auras, disait un sage oriental (des environs de Coubisou, si mes souvenirs sont corrects).
Hier je reconnaissais mon besoin de changement, d'espace, ma soif de reconnaissance, de fortune, et ma peur peut-être de me retrouver à la rue, soit que les métiers de l'expression articale m'aient plongé dans la disette, soit que ma partenaire de vie finisse par ne plus supporter mes sautes de coeur et d'humeur ; or, voici ce qu'il advint.
Je reçus par mail l'annonce d'un chèque de deux millions de dollars que m'envoyaient les frères Coen et Steven Spielberg*, ainsi que la proposition d'habiter dans une péniche (à condition de l'acheter, mais tout de même). Comme quoi il suffit de prier, hein.
Ah, et puis aussi, je me suis retrouvé à la rue. À cause de ce putain de verrou qui referme hermétiquement la maison derrière nous. Nous avons donc dû déranger une dizaine de voisins** et d'échelles pour réintégrer la courette, mais j'ai bien senti que le monde était plein d'un humour étrange.

* La nouvelle, en plus, était signée de la main de ma très-douce, ce qui la rendait encore plus belle.
** Qu'en soit remercié ici Joël "grande échelle" Lez, et mes nouvelles excuses à la petite vieille dame d'â côté qui n'ouvre pas quand on sonne et se retrouve avec un cambrioleur de 2,14 m sur le balcon.

4) Parutions

Au cas où vous auriez quelques oreilles à utiliser, la pause éditoriale de ce blog a permis une exploration des possibilités de la lecture musicale ainsi qu'un nouveau titre, "Pas le flow" sur le myspace de LoFi (qui devrait dépasser aujourd'hui les 1000 visiteurs, on finira par y arriver, à Bercy...)

5) Décodage

Ah, ça y est. J'ai compris. Le verrou qui nous laisse dehors, ce blog qui présente une maquette de maison, péniche dans le mail, amis facebookiens qui causent de hlm, visionnage limite abusif du Dr House.
The world is nudging at us.
Que ce soit bien clair. Je ne déménagerai que pour le paradis. Pour un lieu parfait, qui soit chez toi, chez elle, chez moi, chez les enfants et chez nous. Et sans augmentation de loyer, en plus.

Non mais ho. Je ne me laisse pas nudger aussi facilement.

1.6.10

885 - Tu ne publieras point


1) J'aurai ce courage

Bloguer, plus qu'écrire peut-être, est odieux. Un faux pèlerinage vers la sincérité, reculant chaque jour de deux pas quand on avance d'un - jusqu'à l'écroulement.
Bloguer est égoïste. Je hurle mon existence à la face du monde comme un pianiste de passage dans un bar - qui tape sur les touches, pas franchement faux, pas franchement mal, mais trop loin du reconnaissable pour que les habitués fassent autre chose qu'élever la voix, froncer le nez et finir leur verre. Voilà qui est maladroit, et prétentieux. Les mots sont précieux, et je les éparpille tous les matins comme Onan sa semence sur des feuilles de chou.
Chaque post, chaque aveu, me prend au piège de sa suffisance. Aussi, c'est décidé, je ne publierai plus (même pas un petit commentaire, même pas une réaction, même pas un mot croisé dans la rue et que j'aime).
Le silence, pour arrêter de se souler de bruit.

2) Dès ce jour

Une fois sa décision prise, il s'y tint. Bien entendu. Il aimait les disciplines inflexibles. Il avait arrêté ce qui le faisait souffrir - pourquoi alors ne pas arrêter ce qui lui faisait plaisir ? Car le plaisir, bien entendu, c'était mal.

3) Un instantané partiel de la réalité

Chaque atome de l'univers poursuit sa course vers l'infini, vers le repliement, vers le Big Bang inverse ; je refuse ce matin de me livrer au jeu qui consiste à le nier, en reliant entre eux des points des caractères des signes des mots des phrases ; en étirant l'intime à l'extime, pour .
Cependant, j'ai perdu mes clés.

4) Voilà ce qu'il se (mauvaise) passe

Tu as perdu tes clés. Eu des boutons. Gâché le plaisir. Oublié ta mère. Traité d'égoïste, de méchant(e), de Michel. Oublié la souffrance - celle des autres, la tienne. Perdu ton sac, tes papiers, ton argent, ton indépendance, tes carnets, ton sommeil. Tes dépendances, aussi - pas les toxiques, les autres, celles qui agrandissent la vie.
Alors tu t'étires, te contorsionnes, mais rien à faire.
Tu retournes devant ton ordinateur.

5) Je m'ai trompé

Ce matin, j'ai retrouvé mes clés.

6) Ne lisez pas, c'est pour ma mère

Maman, tu te rends compte, j'ai oublié ta fête. Ça m'a frappé pendant cette mauvaise nuit, parce qu'Emmanuelle me disait qu'elle souffrait de ne jamais pouvoir appeler la sienne, ça m'a frappé derrière la tête comme le maître à l'école quand je me montrais méchant (ou un peu polisson ou un peu trop rapide ou un peu joueur, le maître il trouvait que ça faisait pour tout, les claques derrière la tête).
Merde, j'ai oublié d'appeler ma mère, que j'ai dit. Merde, j'ai oublié d'appeler Maman, que je me suis pensé.
Pourtant, tu me l'avais dit, samedi, quand on s'est eus au téléphone. N'oublie pas de m'appeler, demain.
J'ai trouvé ça bizarre, comme demande. Non seulement parce que ça ne m'arrive jamais d'oublier, rien du tout (oui, bon, l'anniversaire, c'est vrai, et puis cet épisode dont Emmanuelle m'a reparlé cette nuit, celui où tu as failli être à nouveau grand-mère et qu'on l'a su trop tard), mais surtout, un psy m'a dit un jour que les phrases négatives marchaient à l'envers ; que le cerveau entendait "oublie", puis traitait l'information "pas" dans un deuxième temps. Oublie, donc, m'aurais-tu dit selon cette théorie bien accommodante - ce que je me serais empressé de faire, en bon fils bien obéissant.
J'ai pensé à tout, dimanche. À la mère des enfants, pour le cadeau qu'ils lui souhaitaient ; à la mère des autres enfants, pour lui offrir un bouquet de roses ; à la mère des enfants, à nouveau, puisque la mère des autres achetait des cadeaux - elle a même cette élégance, le sais-tu ?
Puis les enfants sont partis (presque sans me dire au revoir, ils avaient oublié), et nous nous sommes retrouvés célibataires, un peu perdus cette fois, un peu gêné pour ma part par ce bourdonnement dans la cervelle des médocs anti-douleur.
Là, bien sûr, j'aurais dû t'appeler. Ou à midi, si nous avions mangé à midi. Si je n'avais pas râlé à ce moment-là. Si je n'avais pas senti le besoin de peindre, d'écrire un morceau de musique, de penser à autre chose.
Mais non, j'ai oublié. Oublié que c'était dimanche, que ce jour-là dans l'année il fallait prendre son téléphone et appeler sa maman.
Je te connais. Tu as dû dire, ça n'a pas d'importance, avec ce petit sourire triste et ce haussement d'épaule qui te console depuis tant d'années. Et Papa a dû dire, tu sais comment il est.
Je m'en veux tellement de te rendre triste. Quand je crie, quand je me mets en colère, quand j'oublie.
Malgré mes 38 ans, il y a toujours quelque part ce petit garçon qui voulait faire sourire (un écho : souffrir ? s'ouvrir ?) sa mère, et qui écrivait dans le journal de l'école des histoires sur la mort. Celle de son voisin, celle de son grand-père. Tu sais, l'histoire qu'il ne fallait pas raconter, ou alors pas vraiment mais quand même.
Celle-là, j'ai du mal à l'oublier. Elle ne me met pas en colère : elle me fait pleurer, encore, quand elle me coince un matin derrière une porte.
Et si elle me met en colère, c'est après tout presque un bien. Des fois, la colère, c'est bon pour passer les portes.
Et puis c'est du passé. Comme la fête des mères, que j'ai oublié.
Je n'ai pas pris le temps de prendre le téléphone pour prendre de tes nouvelles et prendre le plaisir de te raconter nos petites histoires.
Je t'en demande pardon. J'ai été un peu bête, un peu fatigué, un peu blessé, un peu abruti par la vie qui va si vite. Tu sais, toutes ces mauvaises excuses.
Ou alors attends. Mettons qu'aujourd'hui, là, tout de suite, ce serait la Fête de ma mère. Voilà. 1er Juin, fête de ma mère.

Bonne fête, maman. On se voit demain. En plus, j'ai pensé au cadeau.