16.11.11

996 - Aucune urgence

La feuille d'automne
1. Oui, mais...

Il y a tellement de choses dont je n'ai pas eu le temps de parler ici. Le salon de Salins et un restaurant bisontin tard le soir, les sourires ; la gentillesse, sport national à Voiron, Isère ; une traction avant gris pâle à l'intérieur rouge ; des découvertes littéraires, des coups de coeur... (et même Jean-Louis Trintignant, Vian, Prévert et Desnos, tiens, pour faire bonne mesure).
Est-ce que la qualité de mes jours se mesure à tout ce dont je n'ai pas pu parler ?

2. Au théâtre ce soir

Je n'y peux rien : chaque fois que je vois Jean-Paul Bibé jouer La Fête à Fred, je ris, je pleure, j'admire. Je suis fier et ravi.
J'ai l'impression qu'il est meilleur à chaque fois - plus fort, plus fin, plus libre. Du coup, j'ai envie qu'il soit vu partout - je finis par croire, présomptueux auteur, qu'il porte partage des choses sensibles qui rendent la vie plus douce.
Hier soir, à la fin de la troisième première, un canadien démesuré qui avait ri et applaudi pendant tout le spectacle s'est déplié sur nous, et nous a inondés de sa joie. On était bin un peu penauds, le Jean-Paul et moi, mais à un moment on a fini par se dire que c'était un peu pour ça que ce texte existait.
Donc, si tu veux profiter de cette série toulousaine, ou si tu as envie de voir ça dans ta ville, n'hésite pas : clique là où il faut.
Moi non plus, je ne sais pas encore où c'est, mais on va trouver.

3. Une prière, suite


ainsi très vite apprendre au jour le jour la beauté de la vie du souffle du mot je t'aime murmuré au téléphone / la beauté d'accepter que le mot fin soit écrit depuis le début / qu'il ne reste peut-être que l'éclat de quelques jours pour nos yeux/ d'accepter de vouloir se battre et de pouvoir perdre, 
accepter accueillir profiter, croire, espérer sans se masquer l'importance - tu es mon père, je t'aime, je suis ton fils, nous et nous et nous et les autres ne resterons pas plus que le temps d'apprendre que tout ce que notre vie aurait pu être n'a aucune importance si nous l'avons vécue.

-  Dire le mot papa mille fois de suite jusqu'à ce qu'il vous tombe du coeur -

4. Un truc important saisi au hasard

Dialogue, dans la voiture, entre mes enfants et.
- Tu sais quoi ? Il y en a qui disent que M. Untel est gay.
- Ah ? Ouais, bof, je ne sais pas.
Je me souviens d'Espalion, Aveyron, 1980 et des bananes : Francky le coiffeur était pédé,  je ne savais pas ce que c'était mais c'était ridicule - il y avait les mots tapette tapsoune travelo, on mélangeait tout; on riait gras.

Et une bonne chose de faite pour l'évolution des, une.
Demain, on appelle toutes les femmes madame ?

5. Politique friction

Parfois, me dis-je en lisant les blogs politiques, on préfère avoir une opinion que chercher des solutions.


6. Un mot comme un autre

Le désir, nom épicène - de l'ordre du tremblé, de l'imprécis - petite peur qui nous attache et nous délivre.
cf délice/délire.


7. Tu vois, quand tu t'appliques

"tu reçois ce mail parce que l'insatisfaction chronique est une maladie ponctuelle,  ou un truc comme ça. Si tu veux promouvoir autour de toi la diffusion de l'Image, émission quotidienne transmédia et transgenre mettant en jeu la notion de représentation fantasmatique, si tu veux l'incorporer à tes propres projets artistiques, ou si tu souhaites ne plus participer à cette expérience à long terme, merci de le signaler par retour de mail." (l'Image, 16.11.11)

9.11.11

995 - Ne pleure pas, mon ange



(le mot chimiothérapie)

Cette nuit j'ai rêvé de fin du monde - les oiseaux passaient comme des ouragans, tête en feu - balayaient les paysages,
je plongeais au secret de la rivière, dans le gouffre, vers une autre femme et pourtant

quelqu'un, ma mère je crois
me disait

tu as peur pour ton père.

Et bien sûr, oui. Je préfèrerais je crois l'apocalypse, ne plus rien sentir.

Sous mes épaules le flot des chagrins,
refus - non, je ne veux pas, je veux que le monde s'arrête, je ne veux rien penser, rien sentir, cesser de respirer attendre figer
car le hurlement serait trop fort
trop forte l'injustice
trop

le silence

et pourtant je me tais, j'esquive, je m'agite en cuisine en coulisse j'intrigue j'ourdis,
j'organise je vaisselle je range je nettoie

Hier soir, comme chaque fois qu'il vient, la bouteille de gaz est tombée en panne,
la vanne,
C'est lui qui l'a changée, de ses mains bourrues, râleuses,
De ses remarques sur ce que je ne serai jamais,

Je me suis demandé si la prochaine bouteille,
si le prochain pas de vis inversé,

Je ne veux pas de ce chagrin, je ne veux pas le savoir,
Je veux que je me trompe,
Je veux mon ordinaire
Où tout est bien, mal rangé.

Et tu voudrais que je vive, que je gagne ma croûte, que je m'efforce,
Que je fidèle ?

Pleure, mon ange,
Pleure et va-t'en.

(Il se réveilla sans pleurer, dans l'espoir)

2.11.11

993 - Péniblement toutefois

Compo au linge
1. Mais où en étais-je ?

Je m'aperçois que je n'ai même pas parlé du salon "Les passants considérables" de Salins, de la franche cordialité qui règne en Franche-Comté, de l'inépuisable entrain de Pascal de chez DNSB, des locaux bisontins du CRL de, des heures de train... C'est mal, je le confesse, mais pour ma défense, je repars dès vendredi sur la route (enfin, techniquement, la voie ferrée) pour Livres à vous, à Voiron, où j'officierai en tant qu'auteur consort et guitariste de la grande Emmanuelle Urien - mais bon, au cas où on s'y croise, ce serait bien le diable si je ne trouve pas le moyen de te dédicacer un p'tit recueil de nouvelles réédité de frais... Compte-rendu des salons d'automne dans ces colonnes, sous peu.

2. Le monde est beau

C'est le titre du dernier album d'Oldelaf, dont les titres accompagnent en ce moment nos trajets en voiture - et même en bus quand mon fiston Zadig me l'y chante - nos repas, nos réveils... La tristitude, c'est quand tu te lèves le matin avec une chanson de Sardou dans la tête, n'est-ce pas ? Eh bin là c'est un peu pareil, avec un sourire en plus.
Entre les morceaux de bravoure absurdes ("Je suis un lapin dans un four à micro-ondes") et les complaintes du quotidien ("La jardinière de légumes" a remplacé le crépi, maudit dans un précédent album ) apparaissent des tonalités nouvelles, plus intimistes et marquées d'une jolie mélancolie ("Les mains froides"). Comme avant, Oldelaf me fait rire, mais il m'émeut aussi - par exemple dans "Les filles qui s'appellent Valérie", portrait à petites touches, les mains dans les poches, d'une génération post-tout.
Je te parlerai bien des arrangements musicaux traités avec humour façon variété seventies (ce qui fait que ça colle autant aux oreilles, à mon avis) ou des qualités vocales sans esbroufe qui me rendent ce disque plus attachant que le tout dernier Camille (dont j'adore toutefois le premier titre, taré et essoufflé) ou Baba Love d'Arthur H (bon, j'ai essayé, c'est pas mon truc, voilà), mais il est temps que je te rappelle que je ne suis pas critique musical, que tu as des oreilles et ce qui va avec pour te faire un avis.
Parce que sinon je vais finir par te dire que j'ai parfois un peu honte de préférer des oeuvres "faciles" (ou sincères ?) à des trucs d'artissss reconnus et que mes copains adorent, mais bon voilà c'est comme ça et je ne vois pas pourquoi tu es aussi désagréable un matin où j'ai mal à la.

3. Non mais c'est vrai, quoi, à la fin

(Pour Camille, néanmoins, je me souviens des heures passées dans mon immobil-home gersois, juste après mon divorce, redécouvrant le sens de la solitude à travers l'écoute en boucle du Fil, son deuxième album ; je continue à acheter tous ses disques, à apprécier ses recherches et explorations. Peut-être me manque-t-il ce choc de la découverte, ce moment où un son, une chanson, un album, semble donner une texture particulière au monde que nous découvrons ; peut-être aussi Camille a-t-elle posé sur le Fil des choses si essentielles, si fortes, qu'il doit être difficile de rééditer une si belle réussite. On verra. Je m'en fous, je suis pas critique de.)




4. Le monde également


Gronde, donc - Grèce dette rigueur, grincements
Grince et gronde, j'écoute
La guerre ? La colère ?


Ou l'espoir des volcans ?