25.8.09

728 - Papa tango charlie


Depuis le loin des Cévennes, une petite info (et l'occasion de découvrir une radio qui résonne sympa dans la voiture, voire sur Internet) : interview conjointe d'Emmanuelle Urien et mouamême sur les ondes de Radio Escapade (103.3, voire 104.1).

Avec aux commandes Marion, plus connue dans ces colonnes sous le nom de Marylin-la-voisine...



727 - MArdi, je te raconte


Ils tombèrent, tombèrent, tombèrent.

Et tombèrent encore.

Oh, et encore un petit peu après ça.

Ils tombèrent jusqu'à tomber sur quelque chose.

C'était doux. C'était chaud. C'était humide.
Mais ça aurait pu être un peu froid et glacial et distant et irritant, un peu étrange.

Toutefois, quand ils tombèrent, c'était accueillant.

18.8.09

726 - MArdi, je te raconte


- Hors de question, s'exclama Rahoul. Maintenant que je t'ai coincé tout en haut de l'Arbre, tu as intérêt à me raconter tout ce que tu sais.
- Tout ce que je sais ? Mais, heu, c'est-à-dire, je sais déjà que je ne sais rien... et pour le reste, je me demande s'il peut y avoir un reste après rien." répondit Esag.
- Pas de formule, pas d'entourloupe. Tu as intérêt à me dire vite fait bien fait ce que tu as inventé-découvert-imaginé, sinon...
- Sinon quoi ? Est-ce que c'est une façon de parler à son père ? Il me semble que je t'avais parlé du respect, et... mais Esag ne continua pas. Rahoul s'était mis à pleurer - d'un seul oeil, tandis que l'autre évaluait l'efficacité de l'opération.

Esag était plutôt ennuyé. Crier, ça allait. Mais quand Rahoul faisait ces trucs avec ses yeux, et les coins de sa bouche qui descendaient, il ne savait plus s'il devait se mettre en colère ou plaindre sincèrement son fils.

- Bon, bon, je vais te dire... J'ai inventé un truc, mais ça n'a pas de nom... une façon de taper sur les arbres qui permet de.... Comment te dire... Et puis aussi une façon de... Rhô, c'est pareil, j'arrive pas à l'expliquer... Faudrait que je te montre, et pour ça il faudrait qu'on descende, et...

Rahoul haussa les épaules. Il était bien, en haut de son Arbre. Mais puisqu'il fallait descendre, après tout...

Esag et son fils se rapprochèrent du milieu de la plateforme. Rahoul, téméraire comme d'habitude, osa jeter un coup d'oeil au coeur du tronc de l'Arbre, ce coeur pour lequel il était grimpé tout en haut.

On ne voyait rien. Quoique si, peut-être, au fond, comme un nuage, comme une forme, comme une couleur...

- Hé, ne te penche pas ! s'exclama Esag, repris par son vertige. Il se rapprocha de Rahoul et le saisit par la main. "Fais tout de même attention, ça pourrait être..."

A ce moment-là, la pléïstéchione sortit son museau d'entre les branches ; toute heureuse de retrouver son ami Rahoul et le père de celui-ci, elle bondit vers eux.

Et, en moins de temps qu'il n'en faut pour le hurler, Esag, Rahoul (et peut-être la pléistéchione, mais qui sait ?) furent précipités dans le coeur de l'Arbre.



(illustration emmanuelle urien)

11.8.09

725 - MArdi, je te raconte

C'était comme une boule.
Non, comme une pointe de flèche.

C'était orange. Non. Jaune. Non, rouge. Non, bleu.

Ca dansait entre les doigts d'Esag, dégageant une douce chaleur.
Rahoul approcha la main - et la retira immédiatement. La chose l'avait mordu.

- Mais Papa, c'est quoi ?
- Comment veux-tu que je le sache ? J'ai trouvé ça il y a longtemps, dans la forêt. C'est très beau, non ?
- Très beau. Mais ça mord.
- Voilà. C'est bien pour ça que je ne te l'ai jamais montré avant. D'ailleurs, je ne sais même pas comment ça s'appelle.
- Feuuuuu... moi non plus souffla Rahoul.
Et l'instant d'après il sut qu'il avait trouvé le nom pour cette chose.

- Mais avec ça, mon papa, on peut faire ce qu'on veut, non ?
- Théoriquement, mon Rahouloulet. Théoriquement, on peut. D'un autre côté... quand je t'ai dit que j'avais trouvé cette chose dans la forêt, il faut que je précise : je l'ai trouvée à côté d'un arbre qui avait... je ne sais pas comment te dire. Il était noir, sans vie, défait. Il ne ressemblait plus à un arbre. Il était totalement désarbré.

Rahoul réfléchit un moment.
- C'est super, ton truc. Tu me montres quelque chose que tu as inventé, et tu me dis ensuite qu'on ne peut pas s'en servir ? Bin on n'a pas fini de rigoler...
- C'est un peu le problème avec ce que je sais. Je ne sais pas toujours comment m'en servir. Je vois les dangers. Les problèmes. Peut-être que tu aurais envie d'explorer ces choses, mais moi, mes poils de tête se font rares, et je me demande si ce ne serait pas une erreur de t'y entraîner à ton tour.
- Encore une fois, c'est toi qui décides ?
- Je ne sais pas faire autrement, répondit Esag avec fatalisme.
- Et tu en as d'autres, des non-inventions que tu gardes par-devers toi ? demanda Rahoul en colère.
- Peut-être. Peut-être pas. Si on redescendait en parler sur la terre ferme ?

Pendant ce temps-là, dans les branches, la pléïstéchione grimpait toujours.




(ni images ni liens pour cette édition de l'été, pour cause de salade de tomates qui nous attend sur la table, de soleil sur l'Aveyron et de questions diverses et variées...)

4.8.09

723 - Mardi, je te raconte


Esag déboucha hors d'haleine sur la plateforme, en haut de l'arbre ; son fils Rahoul le regardait, l'air passablement ennuyé.

- Bin, papa, t'es fou de crier comme ça ? Tu m'as fait peur.

- Recule, malheureux ! Reviens ici tout de suite !

Esage était si heureux de revoir son fils, et si inquiet en même temps, qu'il en oubliait de le dire.
C'était une habitude, chez lui : il criait d'abord, il s'attendrissait ensuite. Mais il criait souvent si longtemps qu'il en oubliait l'ensuite.

- Papa, je ne risque rien, tu le sais bien. C'est toi qui as le vertige.

Esag se renfrogna. Oui, il avait le vertige, surtout quand il voyait Rahoul se pencher au bord du précipice. Chez les hommes de cette époque, qui vivaient essentiellement dans les arbres, c'était plus qu'un handicap : c'était franchement ridicule.

Esag faisait de son mieux pour le cacher, et parvenait la plupart du temps à le faire ; mais quand il s'agissait de son fils, la sensation était si forte, si terrible dans son ventre, qu'il ne pouvait s'empêcher de le manifester.

- C'est bon, pas besoin de le crier sur les Arbres. Et puis ce n'est pas la question : qu'est-ce que tu fais ici ? demanda Esag.

Rahoul le regarda d'un air surpris :

- Mais enfin, Papa, c'est bien toi qui m'as parlé de cet Arbre ?
- Oui, et après ? répondit Esag.
- Papa, si tu te souviens bien, on n'a pas encore inventé les règles qui empêchent les enfants de découvrir par eux-mêmes. Tu n'as pas inventé l'interdiction, si ?

Esag hésita. Il lui semblait bien que si, quand même. Mais comment en être sûr ?

- Non, non, je suis formel, Papa : tu ne m'as jamais dit de ne pas monter à l'Arbre. J'ai même compris que, si tu m'en parlais, c'était pour que je le fasse moi-même. Rapport à ton vertige, que tu n'aurais jamais pu le faire tout seul. Donc, je suis monté. Logique, non ?

Esag fronça ses épails sourcils. Quand le gamin disait "logique", c'était qu'il était en train de l'embrouiller. Avant que la migraine le gagne, il essaya son arme favorite : le bon vieux coup de gueule.

- JE T'AI DIT DE DESCENDRE, ALORS TU DESCENDS !
- Quand ? rétorqua Rahoul.
- Quand quoi ? lança son père, la voix un peu plus douce. Maintenant, voilà quand. Tu descends maintenant.
- Non, je te demande quand tu m'as demandé de descendre, répliqua Rahoul d'un ton léger.
- Pardon ? Mais à l'instant ! (Esag commençait à être franchement agacé)

Rahoul leva les sourcils, l'air surpris :
- Je ne crois pas, non. Tu m'as dit : "je t'ai dit de descendre", ce qui suppose que tu m'avais dit de descendre avant. Avant de me dire de descendre. Non ?

Dans le cerveau d'Esag, des images de massue dansaient doucement.
- Ecoute... commença-t-il.

Rahoul se figea.
- J'écoute.

Esag ne trouva rien à ajouter. Il bredouilla un instant, puis se perdit dans ses réflexions (très limitées, il faut bien le dire : c'était quelque chose comme un rébus avec le dessin d'un arbre et une flèche vers le bas. Mais ça ne suffisait pas, il le sentait bien. Il manquait quelque chose à son rébus).

Le visage de Rahoul s'éclaira d'un sourire triste.

- J'écoute, Papa. J'écoute, et tu ne dis rien. Comme d'habitude. Oh, pour ce qui est de m'interdire de jouer avec la Pléistéchione, de me rappeler de faire mes deux voirs, tu me parles. Mais le reste du temps... Alors j'en ai eu assez. Assez de faire toujours les mêmes choses, de voir toujours les mêmes fesses." (quand on vit dans les arbres, c'est ce qu'on connaît le mieux chez son voisin du dessus). Et j'ai décidé de partir à l'aventure. Pour découvrir. Pour inventer. Toi, Esag, mon père, qu'as-tu jamais inventé ou découvert ? Rien, si je me trompe...

Les sourcils froncés, Esag essayait de suivre le flot des mots de son fils. Parfois, il poussait un petit râle, quelque chose comme "gnaaa...", ce qui aurait pu l'aider pour son rébus, mais ne faisait rien pour sa compréhension. Fallait voir comment il causait, le gosse : "qu'as-tu jamais inventé", ça voulait dire quoi, au fond ?

Mais Esag avait plus d'un tour dans sa peau de mammouth. Il avait inventé quelque chose, bien longtemps auparavant. Quelque chose dont il n'avait jamais voulu se servir, et encore moins montrer à Rahoul.

Peut-être qu'il était temps, maintenant.

723 - Mardi, je te raconte

Esag déboucha hors d'haleine sur la plateforme, en haut de l'arbre ; son fils Rahoul le regardait, l'air passablement ennuyé

3.8.09

722 - Théâtre encore


Nous étions 4 sous le chêne ; E., C., Jean-Paul (future star du théâtre, il nous l'a prouvé ensuite dans la voiture en râlant sur les dates qui s'enchaînaient et la province qui s'étendait autour de nous) et moi, en ouikend gersois dans une propriété typique.

Nous nous lancions dans les premières répétitions de Petit guide des transports à l'usage du trentenaire amoureux (la fête à Fred), one-man-chaud qui devrait voir le jour d'ici à quelques mois. J'étais impressionné par le talent de JP, campant tour à tour Fred le torturé, David le rugbyman, une bombasse un peu conne et une fabuleuse grand-mère qui passe à taple.

Et la piscine, et les vignes, et les arbres comme des bras de géants montrant le ciel.

Bravement, nous avons résisté aux assauts des cousins armés de dizaines de verres de boisson anisée ; bravement nous avons dévoré des demoiselles* ; bravement, nous avons lancé le feu sur les pistes de danse - place du village, bodega, retour...

Et puis rentrant du ouikend, dans un premier sommeil encore alourdi, le téléphone sonna comme un saut périlleux au bord d'une piscine : c'était grand Yo, qui appelait SOS Tontons - me voilà oncle pour la quatrième fois.

Dorénavant, le 3 août sera le jour de la St Basile.

Welcome, boy.


* Les demoiselles en question, pour les non habitués au typique, sont des carcasses de canard passées au four. Délicieux - surtout quand on aime les masques anti-rides à la graisse de canard.