24.5.16

1124. Où déjà ?

Je m'en fous, j'ai une belle basse
(au téléphone, une journaliste me rappelle que ce blog hybridoïde existe toujours, et qu'il serait temps que je le tienne à jour ; mais regarde, là, sur le papier où j'écris tous les trucs à faire, j'avais noté "blog" tu vois ? Alors hein... N'empêche que la prochaine fois que je passe par ici, je change un peu la déco, ça commence à sentir le vieux moche. Bon, où on en est, déjà ?)

1. Se déplace à domicile

Pas mal de rencontres avec des ados (vois ça sur mon site si ça te dit) ces derniers temps ; j'aime bien me laisser transporter dans les paysages par l'enthousiasme des lecteurs, des porteurs de livres. Ça me remonte le moral - d'autant plus que je reviens des montagnes et que je pars à l'océan.

Histoire de continuer sur le plan "ma vie est un enfer", j'enchaîne sur un joli voyage de noces en Scandinavie nordique septentrionale avec ma colombe - il serait temps qu'on se rappelle qu'on est des épousés, pas juste des partenaires de boulot, de cuisine, de lutte contre le temps administratif et de bagmindtong.
 
Et forcément, des questions toutes bêtes, telles que "écrire, ça en vaut
la peine ?" "Qu'est-ce que je fous de la marche du monde, moi assis lui debout ?"


2. L'histoire de ma vie

Un festival que j'aime me demandait une notice biographonique pour sa prochaine édition. Voilà ce qui sortit :


Manu Causse, auteur, traducteur, buveur, aurait mérité de mourir à 17 ans dans un accident de la route, mais le destin en ayant décidé autrement, fait chier tout le monde à écrire des histoires qui n'intéressent personne, ce qui peut paraître paradoxal. Toutefois, pour se venger de l'ironie de son sort, a décidé de mourir à 105 ans, amoureux, dans un monde libre. Ce qui lui fait un beau programme.

Tu comprendras que j'ai préféré décliner l'invitation, par prudence.


3. Exercices d'admiration, encore

Tu sais ce que ça me fait, d'entendre parler partout d'un livre ? D'écouter les lecteurs qui se pâment ? De lire des critiques élogieuses sur les sites et dans les revues que j'aime ? Bin, forcément, ça m'agace, surtout quand il n'est pas de moi. Et du coup, je redoute le moment où je le lirai - si j'aime, je serai comme tout le monde, et si je n'aime pas, ne sera-ce pas de la pure jalousie ? En fait, j'ai du mal avec l'admiration, soit qu'elle ne vienne pas, soit au contraire qu'elle me paralyse.

C'est te dire si je me raidissais au début des Petites reines, de Clémentine Beauvais, le roman ado qui déchire tout cette saison.

Résultat de recherche d'images pour "les petites reines"J'avais tort. Il est bon. Très. Il est drôle, il est rapide, il est vif, il t'embarque et te retourne comme une galette (au boudin, d'ailleurs). Et au-delà de la jubilation qu'il t'apporte, au-delà de sa finesse enchantée et enchanteresse, il est écrit avec une précision diabolique, une classe folle et une audace impressionnante - parce que Madame B., quand elle écrit pour les ados, te sort le mot diaprer avec autant de simplicité que le mot gate-crasher. Parce qu'elle sait à quel moment te demander ce que toi, lecteur, tu attends d'une histoire avec des filles grosses et moches que tu aimes dès les premiers mots.

Bref, elle fait des trucs quand elle écrit qui me laissent pantois, et c'est là que tu comprends ce que c'est que la littérature vraiment populaire - ou pour éviter ce moche mot, pourquoi ce livre mérite à ce point son succès.

J'arrête là l'analyse, tu comprends que j'en sois sorti écoeuré - trop de talent chez les autres, merde, ça me déprime.

Dans le désordreEt histoire de ne pas laisser la moindre chance de survie à ma joie de vivre, j'ai enchaîné sur Dans le désordre de Marion Brunet, sur un thème proche du roman que je pousse en ce moment.

Ben tiens. Pareil. L'histoire d'une lutte, d'une colère, d'une construction. Avec des mots qui claquent, des personnages qui prennent au coeur. Une voix affirmée, une révolte vraie. Qu'est-ce que tu veux que je t'en dise ? A peine terminé, j'ai fait mieux que le relire : je suis monté dans la chambre de mon Anton (va falloir que je te reparle de lui, un jour, tu sais qu'il me dépasse à présent ?) et je lui ai dit, tu vas adorer. Et c'est pas souvent.

Du coup, je te le dis à toi aussi - sans te raconter l'histoire de ces sept personnages qui s'apprivoisent et décident de vivre ensemble dans les marges de la loi et de la société. Ni même te dire que j'ai aimé leurs doutes autant que leurs certitudes.

Je te l'ai dit : l'admiration, c'est dangereux. Mais bon, quand c'est mérité... 

4. Mais j'emmerde la poésie

Comme tu vois, même pas la force
de terminer par un

retour à la ligne vengeur
une image étincelante
un geste magistral

rien - même pas citer le silence
et pas un oiseau dans le ciel pour me distraire 
ni me chier dessus

Sinon, toi, ça va ?