30.3.10

850 - Passagère fatigue

1) Des lignes
... et le travail en cours avec Marie Lamarche.




2) Amis

Among friends and lovers
Passing time
Ignoring as hard as we could
The howling of our pityless selves

Trying not to burn
In passion and in hate
Trying to care enough
To forgive and forget.

29.3.10

849 - Yep.


1) Tu es lui

Tu es celui d'attendre,
Insatisfait, descontent,
Tu es celui qui guette
L'avenir, improbable
présent parfait où tu ne serais pas

Tu es celui de l'oeil complémentaire,
Celui qui voit le moins, le plus, le double enjeu
Que l'hier au goût de miel accapare et répugne
Car demain sera cendres et aujourd'hui viendra.

Les couleurs que tu cherches, la portée du futur
- dans ton,
/le mot blasphématoire/
ton ventre ton coeur ton dedans ton je suis
savent pauvrement jouir

Et sous le vent qui pousse tu cherches ta présence,
Dans la course, le rude, l'effort au goût acide,
Tu es lui.

2) Bar-mitzvahs, communions et baptêmes

Nous lisions musicaux aujourd'hui pour le CE d'une grande entreprise ; nus avions pour l'occasion pris sous le bras notre valeureux Sylvain, enregistreur, à des fins bassement commerciales : produire un petit CD de nos instantanés de nouvelles.

On ne pourrait pas écrire "nous sommes contents de nous". Ces choses-là sont à réserver aux amateurs et aux inconscients. D'ailleurs, un vrai bon artiste voit toujours des défauts partout.

Mais bon, il y a un moment où nous avons pris du pllllll
du plllll

du pppp

du plaisir à lire, en public, nos musicales nouvelles.


3) Rubrique n'en parlons plus

Vous, un bouquin avec pour titre "Petit guide du tantra urbain : l'orgasme sacré appliqué au XXIe siècle", ça vous brancherait ?

27.3.10

848 - Samedi, rien qui vaille.


1) La petite fille

Je la revois sur la plage
Le ventre arqué le nez au vent
Le soleil blond dans ses yeux pâles
La colère la course le rouge aux joues le hâle
(Vinca major la houssine)

Je la revois sous la joie d'être
Sur les couleurs le grain du sable
Je la revois je la recherche
Dans ton calme apparent
Ton ventre qui se résigne
Ton souffle qui se retient
(Le volcan électrique au puits de tes épaules)

Et le doigt sur l'argentique sur les couleurs du passé
Je frappe une à une
Aux portes de ton ombre

2) Confieso
Combien - trois ans ? Quatre ? Je tiens ce blog. Il me tient. M'est-il une vitrine (pour un produit, ou une pute dans un quartier glauque de Belgique) ou une façon de m'absoudre ? Quand je m'en éloigne, est-ce que je te trahis, est-ce que je me repose ? Est-il travail, torture, délassement / ou flatulence de l'écriture ?
Récemment, j'avoue, je doute. Comme si je pouvais être (le mot serait, si je l'ose) heureux sans écrire - et alors, existerais-je ? Ou comme si je pouvais trouver dans l'écri(tu)re une forme de joie nouvelle - pas celle de l'explosion/ du détruire, celle de l'intrigue patiente, du tranquille vertige.
Et puis cette forme. 1,2,3,4, et une photo. C'était une façon je suppose de m'obliger à moins dire sur plus de sujet. Faire bref, concis. Clair pour une fois.
Cela peut devenir une habitude, une gageure, ou juste une contrainte stupide qui m'ennuie.
A moins que ce ne soit l'étendue des choses à dire qui me fasse parfois rester en silence.
Ou les nouveaux médias ?
Whatever.

Giboulées sur Toulouse - match de rugby perdu - envie d'une sieste ou de musique.
Le sourire amusé de qui continue, malgré tout.

3) Ca me fait penser
Dites, beaucoup plus sérieusement, j'aime bien ce côté work in progress comme on dit en polonais. Les bouts de presque roman, les fragments de chanson, les idées qui diffusent. Mais ça fait quand même quelques jours que ce bout de refrain me trotte par là-dedans,
J'abandonne,
Je ne tiens plus à la vie
J'abandonne
...
Rah merde, elle s'est encore barrée. Mais je l'aurai, promis.

4) La presque blague du presque vendredi

... et là, l'ours lui dit "Tu es sûr que tu viens pour chasser, toi ?"

Il faut le dire, elle est nettement meilleure comme ça, non ?

23.3.10

847 - Le temps du ressort


1) Spring spring spring
C'est pénible. Depuis que je ne fume plus, le mimosa dans ma rue fait un clin d'oeil à mon nez à chaque fois que je passe. Et le vent, aussi. Et les femmes, dans leur sillage.
Ah je te jure, c'était plus facile avant, de se protéger de la beauté du monde.

2) C'est presque rien
Une chanson, c'est minimum 2'30, couplet refrain, paroles qui disent, musique qui va d'un point à un autre ; c'est une unité sonore, je suppose.
Ou alors... ou alors ce n'est pas une chanson.

3) Ce truc sur mon épaule, #8
J'avais l'impression que mon champ de vision s'était rétréci autour du téléphone, de mon doigt sur l'étiquette et du cordon en spirale qui remontait le long de mon coude.
J'ai repris la parole, péniblement. Je sentais ma voix déconnectée de ma pensée, comme si quelque chose s'était glissé entre ma tête et mon larynx.
- Ecoute... j'ai un truc qui est... sur mon épaule, comme une... c'est récent. C'est apparu... Et je me demandais si, de ton côté...
Il m'a interrompu brutalement :
- Tu as bu ?
Comme je ne répondais pas, il a continué :
- Tu as fumé ? Tu as pris quelque chose ? Il faut que j'appelle le SAMU ?
Il n'a pas ajouté "comme la dernière fois".

21.3.10

846 - Comme un dimanche d'élection


1) Autosatisfecit

Il s'aimait moins ces jours-là quand la colère dans sa nuque
Quand l'inconnu familier en son ventre
Quand l'agacé quand l'enfant perturbait
Quand il baissait dans son estime,
et seul,
Perdait le courage de dire de vouloir de raconter


2) çA me RappElle

... que contrairement au maître des lieux qui fêtait son centième, j'ai bu hier en excès, et m'en suis voulu un moment ; quiconque m'en voudrait aussi est prié d'accepter mes excuses.

Moi le premier ?

3) M'en fous, je fais pas politique
Le grand chelem, c'est mieux ou moins bien que le grand soir ?

4) Mes devoirs pour demain
A cause que pour la Teigne, j'avais dit que - et en espérant qu'on retrouve la musique,


DIEU EST AU TELEPHONE
(chanson d'amour)

Lié pour toujours à
Mon téléphone portable
Forfait illimité d'une minute éternelle
Je tape le 666
Le un le deux le fils le père
La sainte trinité

J'appelle le numéro gratuit surtaxé
Ligne directe standardiste
Et la voix analogique
Très haute fidélité
A O décibel de souffle
Me susurre

Patientez un instant vos angoisses
Vont être prises en compte
Pour toute question concernant
La foi le sens de la vie
les raisons théologiques et scholastiques
Prouvant son existence par la causalité efficiente
Tapez le numéro choisi et patientez encore
Un ange passe va vous répondre

Je l'attends je l'attends
Dieu est au téléphone



Ca vous irait ? J'ai essayé de faire ça bien, qu'on soit pas emmerdés.

18.3.10

845 - Une liste et c'est tout


1) Quelques idées originales pour faire fortune
Un club de vacances pour parents célibataire.
Une émission de téléréalité permettant de voter pour son enfant préféré (en tout cas, ça peut marcher comme menace pour les enfants)

2) Ce truc sur mon épaule, #8
- Manu, a-t-il soufflé, je ne comprends rien à ce que tu me racontes.
J'ai haussé les épaules, changé de pied d'appui. Je me tenais debout dans le salon, les yeux encore fixés sur le téléphone comme si j'avais pu apercevoir mon frère au travers. J'ai regardé par la fenêtre. Il faisait déjà sombre. Un soir d'hiver, de fin d'hiver peut-être - une lumière orangée et humide, quelques passants dans la rue qui ne levaient pas la tête.
De l'index, j'ai tenté de recoller, sur le combiné, l'adhésif qui porte les noms correspondant aux numéros enregistrés ; le coin de l'étiquette se recourbe depuis des années, et quand je réfléchis, au téléphone, j'ai souvent tendance à faire ce geste dont je connais pourtant l'inutilité foncière. Quelqu'un d'autre que moi, je suppose, aurait fini d'arracher l'étiquette, où la plupart des noms sont effacés, ou bien aurait tenté de remettre de la colle. Moi, je n'y pense jamais - que dans ces moments trop longs au téléphone où l'on sent soudain à quel point, malgré l'illusion de proximité que donne cette voix à votre oreille, on est profondément seul, profondément coupé de la personne à qui on parle.
J'ai inspiré pour dissiper la gêne - une étrange sensation de honte comme un serpent escaladant ma nuque et l'arrière de mon crâne. J'avais l'impression que mon champ de vision s'était rétréci autour du téléphone, de mon doigt sur l'étiquette et du cordon en spirale qui remontait le long de mon coude.

3) Un constat accablant
Il y a des jours, comme aujourd'hui, où je n'ai pas grand-chose à raconter ; si vous avez des histoires en rabe qui ne marchent pas bien, laissez-les en commentaire, je verrai ce que je peux faire.

17.3.10

844 - Green day (vert comme la peur)


1) Memory

Soirée d'anniversaire, hier ; ceux qui étaient là s'en souviendront (avec un léger mal de tête et un goût sur la langue), ceux qui n'avaient pas pu nous soutenaient, et nous avons pensé à eux.

Pour Elle, il y avait des cadeaux, dont celui-ci,

La femme de 40 ans apprend à ouvrir doucement les portes que des hommes ont refermé sur elle

La femme de 40 ans apprend à ouvrir lentement les yeux sur sa beauté intemporelle

La femme de 40 ans apprend à aimer tendrement le temps que dure chaque étincelle

La femme de 40 ans apprend à secouer gentiment le sommeil des illusions cruelles


Elle a le temps

À présent

Le temps pour elle


Elle se réveille le matin

Le soleil flotte dans la chambre

Elle sourit à son traversin

Son coeur s'étire dans son ventre


Elle sourit au garçon

A côté d'elle dans le lit

Qui ressemble un peu à son mari à son enfant ou à son homme


Elle sourit à l'enfant qu'elle a porté il y a longtemps qui l'oublie lentement qui a porté tant d'elle


Elle a le temps

À présent

Le temps pour elle


Elle sait elle a appris

Le secret de sa vie

Chaque seconde même grise

Est une seconde de prise

Au néant et à l'inertie


40 printemps 40 hivers 40 étés

et

quand viendra l'automne

Il n'y aura personne

D'autre qu'elle

À regarder par la fenêtre

En souriant.


à bientôt pour la musique / et de l'amour, pour toi, plein.


2) Aventures éditoriales


La couverture de Solo Rock, bilingue pour adultes à paraître bientôt, m'est parvenue hier ; je veux bien votre avis, le mien étant encore réservé.

Dans le même temps, j'ai mis un point final à un double projet totalement impubliable (oui, oui, c'est un défi) - un roman illustré recto-verso intitulé E(u)x/Ma vie n'est pas un roman, bordel.

Vu les refus qu'a essuyés la première partie, le fait que je ne vois pas quoi travailler sur la deuxième, et que l'objet me plaît tel quel, avec ses peintures et ses corrections apparentes, je pense me contenter cette fois d'un exemplaire unique. Bientôt sur e-Bay, histoire que je gagne ma vie d'artiste ? A moins que je vous le prête - ça parle de l'amour qui meurt et qui pourrait renaître.

3) Message personnel

Dis, Pascal mon éditeur, tu veux vraiment republier Petit Guide des transports à l'usage du trentenaire amoureux en numérique ? J'y ai bien réfléchi, et j'ai un peu peur.
T'ai-je bien précisé que ce recueil a provoqué de nombreux divorces, dépressions et autres départs à l'aventure ; on a tenté de museler sa puissance dévastatrice en l'envoyant à Oulan-Bator, en Angleterre et sous les tropiques, voire en l'enferment dans un congélateur et en le pilonnant (tout cela est parfaitement véridique et attesté, je peux fournir les témoins).

Comme Raspoutine, il ne veut pas mourir, et comme le Nécronomicon, il peut rendre fou. Que ce soit de bonheur ou de joie ne change rien à sa dangerosité : je ne voudrais pas qu'on te poursuive pour avoir vendu un livre avec de vrais morceaux d'amour dedans.

Cela ne t'effraie-t-il pas ?
(et sinon, j'ai paumé les contrats, tu m'avais envoyé une version papier ?)


4) Partageons un secret

J'ai acheté des chaussures pour courir, mais je n'ose pas les porter - d'ailleurs, je n'ose pas courir en ville.
En plus, elles sont d'un vert fluo qui fait aujourd'hui très mal à la tête.

Effrayant, non ?

15.3.10

843 - Admi(nist)ratif


1) Un cassoulet à Villefranche (vendredi)

L'aurait fallu un écrivain pour raconter l'angle de la lumière sur les murs jaunes de la sous-préfecture, les cols de chemise de guingois et les discours, les photos vieillies et les palmarès (saison 80-81 championne du), les moqueries et les fausses disputes, les visages, les hommes au repos - au repas - repus,
l'atmosphère gaillardement narquoise, le brouhaha,
le partage de la viande dans les grandes cassoles,
le vin rouge, évidemment,
les muscles qui faisaient encore déjà mal,
bref,
la troisième mi-temps au petit pays des hommes qui s'amusent.

2) Fucking morning (samedi)

Je regardais les viornes, le jaune grinçant d'un acacia, le bleu froissé du ciel, et je me souvenais d'un matin de printemps sur un chemin du Gers un jour que je t'aimais, que je croyais à nous au futur aux promesses,

un jour que je m'aimais,

et dans l'escalier aux marches trop larges je portais les cartons, déménageant l'ami qui divorce

comme on porte entre ses bras, jamais assez forts, vingt ans de vie commune,

comme on laisse tomber, usés par l'habitude

la peur, et les regrets

C'était un jour de printemps et l'hiver ne se décidait pas à disparaître.

3) Un trip chez les artistes (samedi soir in town)

Croulant sous les obligations professionnelles et les soucis du quotidien, les Yrf de l'atelier-expo Pourrinet Zofer sont eux aussi en période d'hibernation ; ils en sortaient ce ouikend pour un événement autour des dessins et de la danse de Sarah Nassar - danse butô, il faut le préciser.

Les dessins, comme la danse, témoignent d'une étrange pureté, agitée, nerveuse, presque spasmodique ; le vision d'un corps presque nu, poudré de blanc sous la lumière directe, évoquait la folie, la monstruosité, la souffrance (voire un film d'horreur japonais).

J'ai aimé.
Ca m'a fait penser qu'il est temps que je me remette à la danse. Non, au théâtre. Non, à la peinture. Non, à la musique. Non, à l'écritu... oh et puis zut.

4) Old family
Est-il possible de mélanger le récit du samedi soir chez Marco-le-sérénissime (dans un nouveau projet de balade autour du monde), celui d'un dimanche plutôt tranquille (à peine une nouvelle version de LoFi, ça ne compte pas) et celui d'un matin où ma banquière a décidé de me faire douter de mon principe selon lequel non, les gens ne sont pas cons, simplement ils ont du mal à communiquer ?
Peut-être.
Quelque chose se détache, quelque chose se prépare, quelque chose grandit ; la graine qui lève pense à la fleur
et se rit de l'effort.


Un doux lundi à toi - je t'envoie un bout de ciel bleu et le soleil frais sur un mur.

12.3.10

842 - Friday wear : irritations


1) Ex Emma

En ce moment, un rien m'agace ; les amis qui m'oublient, ceux qui m'appellent, les mails, les non-mails ; le travail, le plaisir, les débats politiques, tout devient matière à grincement des dents. Moi qui ne voudrait qu'agir, je réagis. Je m'irrite. Et risque, j'en suis conscient, d'y perdre un peu de mon joli bonheur, certains de mes jolis compagnons.
Quels rêves me poussent, quelles peurs me guident à me conduire ainsi ? Je l'ignore.
J'en parlerais bien à mon psy,
mais il me fait chier, ce gros con.

2) La ... de la...

Singeounet-couilles-pleines, le petit ourang-outan, se promenait dans la jungle. Au détour d'un bosquet, il fut saisi d'une furieuse envie de baiser. Croisant Sheetta Grandetouffe, sa vieille amie, il lui propose la botte à brûle-pourpoint ; mais Sheetta décline, indisposée par ce manque d'égards.
Singeounet continue son périple, et rencontre tour à tour Samantha Gorilla, Lionna Vulva, Phacochéra-la-cochonne et Zébrina, qu'il implore de le laisser jouer avec leur anatomie. Toutes refusent : Singeounet, c'est connu, n'est pas la meilleure affaire de la jungle. Et c'est dépité que notre héros arrive dans une clairière, où paît paisiblement Dame Eléphant.
- Dame Eléphant, il n'y a plus que toi dans la jungle... Veux-tu, dis, veux-tu que nous forniquions ?
Dame Eléphant jette un oeil au minuscule quadrumane ; peut-être touchée par son désarroi, elle lui signifie d'un geste de la trompe qu'elle accède à ses désirs.
Quelques instant plus tard, Singeounet est à l'ouvrage ; comme Marco Peter*, il se déhanche et ahane, cependant que Dame Eléphant à nouveau paît.
Soudain, une noix de coco se détache d'un arbre tout proche, et percute violemment dans sa chute le crâne de la pachyderme, qui pousse un gémissement de douleur.
Alors, le petit singe :
" -Je t'ai fait mal, chérie ?"

Voilà voilà. Je l'adorais en 6e.

(*Marco Peter, avec Stéphane Leglaive et Régis Lejonc, est membre de l'AAPANE, l'Association des Acteurs Pornos Au Nom Evocateur).


3) What d'you think of

Cette histoire de Facebook, d'amis, de statuts, de retours... Quelque chose qui au fond cherche qu'on le rassure, qu'on lui dise qu'il existe, qu'il a du talent (qu'il existe parce qu'il a du talent ?). Sa façon de quêter les sourires, de se figer quand il n'en reçoit pas ; sa recherche d'une notoriété sur laquelle il cracherait s'il l'obtenait, de succès qu'il n'a de cesse de dénigrer (s'il réussit cela, c'est que c'était trop facile ; si on le trouve bien, c'est qu'on ne compte pas). Certains jours, il se fatigue à vouloir convaincre le seul public qu'il ne séduira jamais, lui-même.


4) Ce truc sur mon épaule (#7)

- Non, Alain, pas une mycose. Plutôt une trace. Une tache. Ca te dit quelque chose ?
Cette fois, j'ai entendu une véritable exaspération dans son silence. Car, quoi que je fasse, je le crains, j'exaspère mon grand frère. Cela a commencé il y a quelques années, à la suite de mon premier divorce, je crois : j'ai commencé à lire, dans ses haussements d'épaule, dans l'angle que faisaient ses sourcils quand il me regardait, dans la façon dont il secouait la tête, un agacement croissant. Comme si je l'avais déçu, comme si je me comportais comme un enfant un peu stupide, égoïste et malpoli.
Etait-ce vraiment, d'ailleurs, à la suite de mon divorce ? Etait-ce celui que j'étais devenu, célibataire vaguement libertin - dans les traces, il faut le dire, de notre très cher père - qu'il ne supportait pas ? Parfois, quand je prends le temps d'y réfléchir, je me dis que cela a commencé un peu plus tôt ; qu'à l'époque de mon premier mariage, déjà, j'avais l'impression que mon frère me jugeait mal (ou jugeait mal Catherine, que je venais d'épouser).
Et puis il y a eu ce fameux soir, avec Sylviane. Même si aucun de nous trois n'en a jamais reparlé, nos rapports n'ont plus jamais été les mêmes.
- Manu, a-t-il soufflé, je ne comprends rien à ce que tu racontes.


5) Non je n'ai aucune conscience politique

Dimanche, vote en région.

Rien à foutre, puisqu'avec la disparition, entre autres, de la taxe professionnelle, la fusion des organismes régionaux et généraux, la recentralisation galopante, la région ne pèsera plus aucun poids face à l'État.
Vivement que notre bon Nicolas nous parachute royalement un de ses amis, qui saura mener d'une main juste mais ferme la Ferme Générale d'Occitanie !

Tiens, vous voyez que je suis agacé : j'ai mis un point d'exclamation.

6) Je suis naïf (j'avais oublié de le dire)
Dans les confins de l'univers perceptible, les astrophysiciens cherchent encore la trace de l'amour qui l'a engendré.

11.3.10

841 - Reprise des hostilités


1) Blog philo
Quand tu n'as plus envie d'écrire un blog, est-ce parce que tu penses ne plus présenter aucun intérêt, ou parce que tu considères que ta vie est devenue comme normale ?

2) Nouvelles formes d'écriture
A la foire du livre, plusieurs personnes m'ont fait cette remarque : ah, vous êtes le Causse, celui des statuts facebook ?
Pour les ceux qui ne participeraient pas au fameux fantasme de partouze communicatoire universelle, un statut facebook est (était, puisque fb est en cours de ringardisation avancée) une petite phrase, un genre de pitch changeable à volonté, commençant par votre nom. Genre "Manu Causse..." et vous ajoutez "fait la vaisselle en slip léopard". Si vous envisagez d'attirer à vous le marché des ménagères de plus de cinquante ans, ou si vous souhaitez exprimer une facette de vous qui vous enchante particulièrement.
Or donc, plutôt que de mes livres (dont le dernier, le livret carte postale Le facteur n'est pas passé, s'est littéralement arraché à Bruxelles, malgré les terribles cernes sous les yeux de Pascal l'éditeur), on m'a parlé de mon statut facebook.
J'ai rougi, comme d'un compliment ; objecté que non, mes statuts n'étaient pas si dingues que ça, rien à voir avec ceux d'un Claro, par exemple (qui donnent envie de ne surtout pas lire ses traductions, vu qu'on aura peur de ne pas comprendre) ou d'une Alexandra A. (qui donne envie de l'épouser, mais ça me fait ça très vite avec les femmes qui écrivent).
Mais vu l'hyperproduction desdits deux, j'en viens à me demander si le futur de la littérature tant dans sa production que dans sa critique, ne réside pas dans l'utracourt, l'instantané périssable - où les aphorismes de Chevillard apparaitraient comme d'insupportables pensums dont seuls quelques universitaires comprendraient l'intérêt.
Dans quelques mois, on aura sans doute des statuts comme

Gus Flaubert -
chie sur Emma, puisque c'est moi

3) Ce truc sur mon épaule (#6)

Il y a eu un temps assez long au téléphone.
- De peau ?
- Oui. Un problème de peau. Tu en as déjà eu ?
J'ai entendu mon frère souffler dans le combiné. Je pouvais l'imaginer, fronçant les sourcils dans l'expression qu'il affiche lorsque mes questions lui paraissent incongrues - c'est-à-dire très souvent.
- De quoi tu parles ? D'acné, d'irritations, d'infections ? Une mycose ?
Derrière lui, il m'a semblé que les bruits de fond avaient soudain baissé d'intensité, comme si Sylviane, au mot de "mycose", retenait son souffle, tendait l'oreille ; peut-être avait-elle figé son geste, cessé de frictionner la peau des enfants qui sortaient du bain. Peut-être les enfants, eux aussi, avaient-ils saisi l'étrange qualité de ce silence, de l'écho qui rebondissait mollement sur le tapis humide, sur les serviettes chaudes.
Mycose. Tonton et Papa parlent de mycose
Evidemment, je pouvais comprendre que le coeur de Sylviane se mette à battre plus vite.
- Non, Alain, pas une mycose. Plutôt une trace. Une tache. Ca te dit quelque chose ?

4) La note d'espoir dans un monde de brutes

Alain Madelin veut un "français traditionnel" au poste de président de la HALDE. Whatever.

Moi, je voudrais des hommes politiques intègres,
des débats intelligents,
des journalistes qui ne vont pas rechercher une vieille non-gloire "retirée de la vie politique" pour ses petites phrases et ses anciens faits d'armes nauséabonds.

D'un autre côté, cela ferait quelques millions de consultations google en moins.

8.3.10

840 - Back from Brussels


1) J'avais oublié mon appareil photo

La mouette à tête noire
Volait sur le canal
Près de la cheminée d'usine
Fenêtre sur brique sur cadre sur tram

Nous roulions d'une voix douce
Sur les pavés disjoints
Les festons du soir jaune
Accrochés aux rebords
De l'acier et du ciel

Tout au fond, sur la lande
Au milieu de la ville
Une maison étroite
Où s'étranglait le vent entre les briques et les traces d'une existence
Au rebut

(Tour & Taxis, parking, Bruxelles, 7.3.X)

2) En direct de Bruxelles
Partir très en retard, nausée coléreuse dans l'avion ; pouis (oui, pouis) retrouver le petit grand pays et ses usages, l'accueil délicieux, la foire et ses livres, les visages connus, les amis ; fêter des anniversaires sur les /st'aè'nt/s.

Samedi, foin des livres : El Greco (le reflet d'un pourpre sur une armure damasquinée, la torsion des lumières, les imitations si loin de la flamme) et Frida Kahlo (nos livrets à la main, comme si les mots étaient nécessaires, inséparables - les carnets projetés que j'ai appréciés entre tout, malgré des inscriptions comme Staline je t'aime). Puis un peu de Bruxelles, tout de même, où marcher est si doux.

Refoire - Pascal était plus noir que bleu, il a fallu que j'anime, sautant sur les visiteurs comme un berger des Pyrénées ; cela avant qu'un créature à l'aspect angélique vienne révéler nos appétits purement terrestres - nous avons bien ri de l'admiration que nous autres hommes portons si souvent au blond d'une chevelure, à l'oeil azurée, à un bras qui dépasse d'une soyeuse fourrure.
Soirée Quadratures - auteurs, éditeurs, petite famille dans la chaleur d'un salon aux plafonds hauts. Salon ? Le terme est grégaire, mondain, les coteries méprisables ; c'était, plutôt, une famille dans la pièce à vivre. Illustration : Gaëlle, Isabelle, Corinne, Emmanuelle, les coudes sur la table, échangeant de leurs nouvelles dans leurs murmures de filles.
Dimanche, foire et refoire, un peu comme une gueule de bois ; plus trop d'enthousiasme, le navire allait sur son erre ; quelques retrouvailles, néanmoins, et une promenade sur les quais entre les galeries de métal et de verre, quelques cadeaux.
Aéroport ; photo mentale ; maison.

Retrouver ce que nous y avions laissé.

3) J'avais oublié de la faire

Blagounette qui me revient hier - esprit de l'escalier, voire de l'escalator - et exercice d'écriture, en ces temps de correction de roman.

À l'époque de la guillotine, deux français et un belge sont condamnés à mort pour un crime qu'ils ont commis en réunion.
Le jour de l'exécution, le premier des Français pose sa tête sur le billot ; le bourreau actionne le levier fatidique.
Or, rien ne se produit . La machine ne répond pas, le couperet reste immobile.
Dans ces cas-là, la loi est claire : le prisonnier est grâcié.
Remerciant le ciel, il s'éloigne de l'échafaud - que le second français gravit juste à sa suite.
Et, à nouveau, miracle : la lame ne s'abat pas. Stupeur des témoins, et, comme précédemment, grâce pour le condamné.
Alors vient le tour du Belge. Qui, avant de prendre position, considère la guillotine d'un oeil critique et lance :
"Dites, ça ne serait pas le machin, là, qui coince ?"

3.3.10

839 - One more time (in grey)


1) Suspect (de poésie)

Tu sais ce sentiment
L'envie de toi qui se dessine
Comme
Le sable sous
Le flux descendant
Les prises s'effondrant à la cheville
La fatigue déjà,
L'indifférence
L'humeur étale comme l'heure qui jamais ne saura repartir
Le marais, le stagnant, le morose

Il faisait gris à ta fenêtre
Peut-être rêvais-tu de fumées
De flammes couvant sous la cendre
Pour étouffer ou repartir

(Et ce jour-là une chaloupe raisonnable jouait l'espoir à l'horizon)

2) La citation fort à propos

Marrant, ce besoin qu'ont les hommes de mer de faire des phrases.

3) Ce truc sur mon épaule
Alain a décroché. Je l'ai salué, il m'a répondu sur un ton de sèche surprise, un peu comme s'il pensait C 'est toi ? Qu'est-ce que tu as à m'appeler ? Nous avons échangé, comme je le craignais, quelques nouvelles ; à vrai dire, je lui ai posé des questions sur son travail, j'ai hasardé quelques opinions sur la santé de notre père et ses dernières fredaines (à plus de soixante ans, il envisage de se remarier ; ni mon frère ni moi ne nous y opposerions, évidemment, mais cela nous semble étrange, incongru - voilà quinze ans au moins qu'il passe de maîtresse en maîtresse). Et puis, à contrecoeur, j'en suis venu au sujet qui me tenait à coeur.
- Dis-moi, Alain, est-ce que tu as déjà eu des problèmes de peau ?"
Il y a eu un temps assez long au téléphone.

4) No friday wear (mais du copinage)
Vendredi aux aubes, départ pour la Foire du Livre de Bruxelles (et peut-être, si Machin le veut, l'expo el Greco ?) où nous signerons je l'espère de toutes nos mains disponibles, sur le stand de D'un Noir Si Bleu voisin du stèènt de Quadrature ; il n'y aura donc pas de Friday Wear. Du coup, je ne pourrais pas placer cette blagounette de la semaine, offerte hier par l'ami Yrf et qui tombe en plein dans une thématique d'actualité (enfin, pour trois personnes au moins),
pourquoi le Muppet Show ?
parce le dur pète froid.

Au moment où j'écris ces mots, j'essaie de ne pas me sentir désolé.

1.3.10

838 - Pour causse d'inventaire


1) What's that ?
Avis à toi, lecteur unique : il se peut qu'arrive dans ces colonnes une période d'intermittence. Je m'en sentirai peut-être légèrement coupable, ou fautif ; j'imaginerai peut-être ta déception et ta colère, voire ton mépris.
Il faut croire que j'ai envie de penser à ces choses, dans mon coin.

2) Même pas vrai
Je le répète : je n'ai PAS remplacé Télérama par Challenges depuis que je suis entrepreneur. Et la photo qui circule sur le net à ce sujet est un grossier montage.

3) Ce truc sur mon épaule
J'ai appelé mon frère. Nous ne nous téléphonons presque jamais - un mail de temps à autres, une carte pour les voeux- mais j'ai décidé que cette histoire était assez importante pour que je rompe nos habitudes.
Je l'ai appelé vers 19h30, heure où, je le savais, il avait toutes les chances d'être chez lui, et où Sylviane, ma belle-soeur, ne risquait guère de répondre, occupée qu'elle était à doucher les enfants. Ce n'est pas que je refusais de parler à Sylviane - au téléphone, elle est toujours exquise, me demande de mes nouvelles et sait orienter et faire durer une conversation que, sans elle, je ne saurais mener au-delà de quelques phrases de circonstances - mais, ce jour-là, il me semblait au-dessus de mes forces d'échanger des nouvelles sur ses enfants, mon travail et le sien, la météo ou la politique. Je voulais simplement parler à Alain, mon aîné de quatre ans. Entendre sa voix, lui confier mon inquiétude.

4) Doué avec les titres
Tu préfères Vivre avec son narcissique, Survivre au narcissique, ou Narcissique, mode d'emploi ?