31.3.12

1006 - Parler de mois

De concert
1. Une semaine sans

Vendredi dernier, au Salon du livre et du vin de Balma, Brice Torrecillas nous interviewaient en trio : Frédérique Martin, Emmanuelle Urien et.
Ces petits moments où, devant des questions fines et poussées, on se découvre - au risque de révéler, comme le fit remarquer Brice, que ce blog était "bizarre, parce qu'il montrait le tout-venant au lieu du poli, du fini".
Ca m'énerve, parce qu'il avait raison.
Du coup, j'ai décidé de ne plus parler de moi pendant au moins une semaine, na. Compte facebook coupé,blog à zéro... Bonnes résolution : cesser de tourner en vélo autour de mon nombril.
Et, évidemment, on n'a cessé de me solliciter. C'est ainsi que j'ai eu l'honneur de répondre aux conjointes questions des quatre occupantes d'un blog qui ouvre dimanche matin. Aussi, j'ai rédigé l'argumentaire de l'Eau des rêves, roman pas du tout autobiographique même si, qui paraîtra à la rentrée en Belgique et en France.
Bref, j'ai encore cédé à mon péché mignon : raconter ma vie pas exceptionnelle, faire visiter mon intérieur meublé cheap. D'ailleurs, pour être tout à fait honnête, j'en ai aussi profité pour fignoler une nouvelle intitulée "Bruxelles ou la grosse commission" ou un personnage borné, lâche et indécis est aux prises avec une envie de au milieu de la belge capitale. Toute ressemblance avec des auteurs ayant existé étant, j'espère ne pas y perdre d'un coup tous mes amis belges...
C'est vrai quoi : des fois, je me dis que je n'écris que pour parler de mon. Pour me rédemptionner un peu, quelque part.
"Sauvez mon âme : achetez mes livres", ça ferait un bon slogan d'après toi ?


2. Une semaine avec.

Hors des autocentrismes, le salon de Balma fut l'occasion de deux belles rencontres : Pierre Barouh, d'abord, qu'on ne présente plus (et le premier qui parle de chabadabada a perdu). Depuis trois ans, j'écoute plus ou moins un disque produit par lui et sa fille, le cabaret Shinjuku, où des artistes de Tokyo rivalisent d'invention. Ca nous a ouvert un champ de discussion - mais c'est à la fin du repas, quand en toute simplicité Pierre a dit qu'il aimait chanter, et l'a fait, que la magie est arrivée, sous le chapiteau. Joli moment ; j'espère que.

Il y eut aussi la rencontre avec François Chollet, mon voisin de table - que j'ai agressé dès qu'il s'est assis parce que, ayant lu son livre, je voulais savoir comment on pouvait aller aussi loin en littérature, s'il s'agissait de provocation gratuite, de mépris du lecteur, de recherche d'effet... il faut dire que ledit bouquin m'avait collé une jolie claque à sa lecture. Je relirai Un garçon si tranquille à tête reposée : mais François, lui, est un garçon (voire un homme) charmant, modeste et drôle. Nous avons parlé de limites, d'interdits, de distanciation (tous ces sujets sur lesquels, tu le sais, je trébuche parfois avec mes crampons de rugbyman). Et, bon, malgré un public plus clairsemé que les années précédentes, c'était un chouette salon.

3. Une semaine pour

Les amis, où en sont-ils (parce que c'est bien joli de parler de sa g, mais tout de même) ?
Oh ! m'inciterait à voter pour un candidat plus rouge que rose (ah oui, parce que j'ai décidé fermement : j'hésiterai jusqu'au bout) ; Sister Slacks prépare la sortie de son premier album ; l'émission Pas plus haut que le bord, après avoir accueilli le candidat Super Rebelle incarné par Christophe Alévêque, poursuit son petit bonhomme de. Bref, politique et musique sont à l'affiche pour les prochaines semaines.

4. Grande étude de marché internationale

Lançons ici un grand concours : nous recherchons en ce moment un titre choc pour les enregistrements des lectures musicales que nous avons souvent proposées dans des festivals et autres salons.Toute suggestion, information, idée, avis... sera accueillie avec.

21.3.12

1005. Une question de foi

1. Peur sur la vile

Hier soir, petit tour dans les rues de Toulouse. Malgré ce que clament les journaux, nous ne sentons pas la peur ; oh, bien sûr, on remarque les scooters, les voitures de police ; on se dit que devant ce restaurant se tient en général une file, ce qui n'est pas le cas ce soir. Mais nous voulons, nous décidons de rester bien, à l'aise dans notre ville. De rire de nos craintes. Nous voulons avoir confiance en la police, en l'effet de nombre. En la démocratie et la sagesse d'un pays.

2. Bonne guerre

C'est un mail d'un copain qui ce matin, au réveil, me met la puce à : Le Pen se répand à la télévision. Coup d'oeil sur un des sites d'infos en continu, et la nouvelle se confirme : on a trouvé un suspect.
La joie et le soulagement seraient presque masqués par ce que suppose l'identité du tueur présumé. Un Français ayant des liens avec le terrorisme islamiste.
Un fou.
Au fond, si comme je le pensais il y a deux jours, ces actes avaient été signés par un fou ayant des liens avec le terrorisme d'extrême-droite, je me serais senti moins pesant : le risque d'entendre aboyer la frange la plus réactionnaire et populiste de notre pays aurait été moindre. Aurais-je eu, alors, le courage de dire : fou pour fou, il s'agit de l'acte exceptionnel, tragique, d'un déséquilibré qui méprise la vie humaine ? De dire que je souhaitais longue vie à mon ennemi, pour que nous ayons tout le temps de lui montrer qu'il s'est trompé ?
Plutôt de lutter contre, je préfère lutter pour - la paix, la compréhension, le dialogue.
Il est possible que les politiques restent décents sur le sujet ; il est possible qu'ils tirent les mêmes leçons que nous de cette tragédie : à force d'attiser les haines, d'exacerber les différences, de résoudre les conflits par la violence, on lui laisse le champ libre.
C'est donc le moment d'entrer en paix.

3. Un brin de courage


Bon : une personne dangereuse est mise hors d'état de nuire. Nous continuons à avancer pour vivre ensemble.

4. Question silence

"Votre entreprise visant à tenter de traîner dans la boue 20% de Français à raté.", lance un communiqué du FN à certains candidats, qui demande aux personnes citées de se "taire pendant un long moment". - (avec AFP) 
Donc, quand on parlait des appels à la haine, quand on imaginait le tueur comme un fou intégriste motivé par la détestation de l'autre, on stigmatisait l'extrême-droite ? Et comment doit-on comprendre le silence de celle-ci sur Internet dans les jours qui viennent de s'écouler ?  
Parler, donc. Sans réduire l'autre au silence. 
Le vrai défi de la démocratie.

19.3.12

1004 . La politique en transe haine

1. Petite rue

C'est ce joli quartier, à deux pas de chez nous, où je me promène parfois le dimanche ; chaque fois je pense qu'on dirait un village, que j'aimerais une maison dans ces rues où alternent les quasi-fermes et les villas d'architecte. Il y a quelques mois, j'ai remarqué par hasard cette grande grille, réussi à déchiffrer derrière elle un panneau indiquant qu'il s'agissait d'une institution juive.
Ce matin, la grille est ouverte à la une des journaux.
Quelques jours plus tôt, des militaires abattus dans la rue - on apprend qu'outre leur métier, ils avaient en commun "d'appartenir à la diversité" comme le dit avec élégance un général. Avec beaucoup moins d'élégance, un ministre suggère "qu'il n'y a pas que des Français en France" et qu'il faudrait sans doute chercher le meurtrier - apparemment un seul et même homme - dans les rangs des étrangers pas de chez nous.
Finalement, d'où je suis, ce même lundi matin, j'ai l'impression que les imprécations racistes et haineuses de l'extrême-droite, reprises avec entrain dans la campagne du président sortant, ont fini par porter leur fruit abject.

2. Doutes en direct

Et nous voilà accrochés au fil d'actualité tandis que les sirènes retentissent par la fenêtre ; plissant la bouche lorsqu'on apprend quelles personnalités vont se rendre sur place - agacés quand il s'agit de l'omniprésident, fatalistes quand c'est son quasirival qui s'annonce.
Puis, au fil des statuts sur les réseaux sociaux, je m'aperçois avec horreur qu'une partie de moi souhaite que le meurtrier soit bel et bien un Breiwik local - et non, comme le craignent certains, un intégriste islamiste.
Le nez sur la blessure, j'ai l'affreuse impression qu'une partie de l'élection à venir, et donc du visage du pays, de l'Europe et du monde, sera affecté par cette différence, infime au fond - la haine de l'autre et la folie n'ont pas de couleur.
Un tireur d'extrême-droite : nous nous en prendrions à ceux qui répandent ces idées. Nous ravirions de les voir chuter dans les sondages.
Un tireur intégriste : nous décréterions (je parle de nous, les gens de gauche qui pensons que le monde sera meilleur en partageant nos intelligences, nos sensibilités, nos faiblesses et nos forces, nos cultures) qu'il s'agit d'un cas isolé, et nous désolerions que les droitistes s'en servent pour justifier des mesures sécuritaires amenant à davantage d'exclusion.
J'écris sous un ciel jaune, dans cette incertitude où je lis un signe fondamental des limites de notre pensée binaire, du bien opposé au mal.
Je dormais ce matin quand on tuait à cent mètres de chez moi des enfants de l'âge des miens.
J'ai envie de sortir dans la rue quand la justice aura fait son travail, et de marcher avec tous ceux, quelles que soient leurs convictions politiques, leurs origines et leur histoire, qui savent que seule la solidarité et l'acceptation de l'autre permettent de lutter - souvent mal, souvent trop tard, mais il en va ainsi des catastrophes - contre la folie meurtrière et la haine.

3. Des mots, déjà
 
Tragédie, dit l'un.
Je pense que le terme désigne d'abord une pièce de théâtre, une mise en scène - la représentation de la fatalité, de la sanction qui s'abat sur l'orgueil démesuré des hommes. Au micro d'une radio, un témoin dit que c'était "comme au cinéma". Je me prends à rêver d'une arrestation immédiate, d'un tueur repéré, cerné, désarmé (une partie sombre de moi exige, comme dans les histoires, qu'on abatte le monstre).

Déjà, nous nous éloignons de l'insupportable réalité ; nous faisons de notre mieux pour la comprendre, pour lui donner un sens - un autre sens que celui que le meurtrier lui a attribué dans ce que nous nommons sa folie.

J'espère, dit une correspondante, qu'il s'agit d'un acte isolé. Je ressens à nouveau cette crainte de l'insurrection, de la guerre haineuse propagée autour des délires de quelques-uns (et qui me fait tout autant me méfier du concept de révolution). Oui, on dirait bien qu'il s'agit bien d'un seul homme, formé à l'utilisation des armes, agissant avec détermination et sang-froid. Un monstre.  Un fou.
Un être humain.


4. Badaud

J'hésite à me lever de mon siège, traverser les deux rues qui me séparent des lieux du drame. A aller voir ce que la presse instantanée sur internet n'est pas assez rapide à me fournir, peut-être tenter de réconforter, de partager mon indignation, ma volonté de justice et de paix. Je me retiens : je ne pourrai que gêner le travail des enquêteurs. Quelques hommes politiques, en revanche, jugent qu'ils seront utiles sur place. Ma douce se demande combien de policiers seront distraits de l'enquête pour assurer leur protection.

Une averse de grêle s'abat sur notre toit

5. Au fil des réactions

Alternativement, je tente de me remettre au travail et m'accroche au fil des actualités - avec un peu de honte à l'idée de ma curiosité morbide autant que de mon impuissance.

Une première nouvelle tombe ici, pointant les responsabilités de ces meurtres sur les milieux de l'extrême-droite. Une première piste d'explication, rationnelle - logique. Quelque part, j'en suis soulagé, même si cela ne change rien au drame.

Je me sens en colère, peut-être plus contre l'exploitation politique du drame (or, que fais-je d'autre à écrire ?) que contre son auteur (quand j'imagine celui-ci, c'est la peur qui prend domine).

J'ai l'impression que le tissu du quotidien s'est déchiré ce matin, ouvert sur une folie violente et haineuse. Et je me souviens des paroles d'un ministre norvégien, qui décidait de répondre au massacre d'Utoya par davantage de démocratie et d'humanité.Parce qu'il s'agit de nos seules armes.



12.3.12

1003. Pour écrire

Femme qui danse avec son ombre
1. La graine

Sommeil de plomb, goût lointain dans la bouche : traverse en ce moment une période qui me rappelle des moments déplaisants. Doutes, vanité des vanités et tout n'est que, je m'en foutisme et jogging (le vêtement, pas le sport) : on pourrait finir par croire que.
Alors quoi ? Je m'en remets à ce blog. Entretenir la forge, garder le fer au chaud ; se raccrocher aux branches de la même histoire, toujours.
Cette fois, beaucoup moins pour te toucher que pour conserver la foi - et le coulant - de l'écriture
(impression d'avoir tapé un gros mot)

2.  Néanmoins

A la décharge de mon côté dépressif, il faut toutefois dire que je me plonge en ce moment dans la réécriture de Déjà que tout seul j'ai du mal à vivre ensemble, troisième recueil de nouvelles et dernier du cycle du trentenaire amoureux (pour cause de limite d'âge, évidemment). Une saison en enfer, ou pire, en D2.
On dira ce qu'on voudra, mais aller chercher les flammes de son petit bûcher personnel, même à des fins distanciées et littéraires, ça a tendance à vous roussir les poils de l'âme.

3. Cela dit

Ce fut samedi un très chouette salon , à taille humaine, avec des rencontres et des talents ; on y vit aussi l'immense JP Bibé dans la Fête à Fred (match retour en cette fin de semaine, au Chien Blanc de Toulouse, et cette fois, on veut du programmateur international venu au moins d'autres départements) ; et je m'aperçois avec horreur que je n'ai pas parlé de Bruxelles et des édittions Luce Wilquin, de Onlit qui nous poussa à acheter une liseuse numérique, puis une autre (la première, signée d'une enseigne au nom virginal, n'ayant pas convaincu), si bien que ma douce peut à présent lire des signes électroniques sur un écran supportable et que je sais pourquoi les DRM sont, tout de même, une grosse MRD ; je n'ai pas parlé des éditions DNSB qui, en plus d'accepter avec le sourire le retard prévu du manuscrit du prochain recueil de nouvelles, soutient l'enregistrement de notre CD de lectures musicales (et dès que quelqu'un trouve un meilleur titre, qu'il me prévienne) et envisage la publication de l'Image - oui, ce texticule érotique qu'avec un peu de chance tu reçois
quasiquotidiennement dans ta boîte mail. Et du coup, j'ai oublié de te parler des nouvelles de Lunatik, du roman d'Éloïse Lièvre - tout comme j'ai passé sous silence mon coup de coeur pour la douceur folk d'Uniform motion...
Une conclusion s'impose : plus je laisse traîner ce blog, moins j'avance. J'en tire les conclusions qui.

4. En guise d'essai

Néanmoins croire que la fin
ne sera qu'un passage
contre toute évidence, pour la beauté du sport,
parce que déjà, à plusieurs reprises, tu entrevis,
et malgré la raison, et malgré la science,
continuer à chercher
le souffle dans le vent.