3.5.08

Une fois n'est pas couture : appel à témoins

Ratés, encore.
Hier soir c'était "enfants couchés, soirée télé". C'est si rare que ça en devient presque une fête, pour nous autres pauvres n'écrivains.
Princesse avait acheté à vil prix un DVD. Vernoux, Baer, Béart, Kélif : ça s'appelait "à boire" et ça promettait.
En attendant, nous jetâmes un oeil à Tracks, l'émission rock de Arty.

Et c'est comme ça qu'a commencé une longue, longue soirée de "mais putain qu'est-ce qui cloche ?"

Tracks, je savais déjà : chaque fois que je le regarde, je ne peux m'empêcher d'admirer à quel point toute trace d'information intéressante peut être soigneusement gommée des reportages. A priori, tu ne t'intéresses pas aux clips de musiques alternatives allemandes ? Ouf, ça peut aller, tu continueras : pas d'extrait de plus de 3 secondes, pas d'explication ; un namedropping effréné accompagnée de changements de thématiques éclair (Markus Ruttshmellkitte, le réalisateur-phare du clip des Huffery Bins primé au festival de Logrando, avec son ami Ulrich Valparaiso que l'on voit ici à l'oeuvre sur le court métrage à propos de Gran Dolmaan qu'il a tourné cet été à Rominstadt...). Même Princesse, qui attendait un sujet sur Portishead, s'est lassée de voir une vieille interview de Beth Gibbons (une tournée ? un album ? Peut-être, mais Tracks ne donne pas ce genre d'infos vulgaires) pimentée de 7 secondes d'un extrait live (dudit nouvel album ? sans doute, mais ce n'était pas précisé)...

Po-si-tif, on a dit, bordel.

Heu... C'était peut-être que mon Canabols du soir me faisait voir tout en noir ? Suivre le montage haché, écouter la voix off et ses remarques super intéressantes ("le point commun de toutes ces chanteuses, outre qu'elles sont des femmes, c'est qu'elles aiment les chaussures") : j'avais l'oeil peu bienveillant.

On a enchaîné sur le film de Marion Vernoux.
Et ouille.

C'était une comédie à la française : son toujours à la limite de l'audible, budget serré (les extérieurs ressemblaient à des intérieurs, et les intérieurs ressemblaient à des cartes postales ; les acteurs coûtant cher, on les avait habillés avec des fringues de l'armée du salut). De très belles images, avec des idées marrantes (scènes de "neige" qui ressemblait au brouillard, reflets dans des vitrines) qui, peut-être, faisaient référence au problème des personnages : vivre bourré en permanence.
On reproche souvent au cinéma français son excès de psychologisme : là, c'était bien, il n'y en avait pas trace (ah si, deux allusions dans un dialogue). Les personnages étaient des alcoolos, point. Leur raison d'être, leur histoire, leur langages corporels et gestuels, rien ne semblait vraiment raccord d'une scène sur l'autre (pas plus que l'oeil poché d'Emmanuelle Béart, qui alternait joliment de gauche à droite).
Bref, des trouvailles en pagaille pour détourner les codes du genre. Mais au fait, c'était quoi, le genre ? Comédie ? C'est vrai qu'une comédie, ce n'est pas forcément drôle. Drame psychologique ? C'est vrai qu'un drame n'a pas besoin de sonner vrai. Exploration de caractères ? Vi vi vi...

Bref, on est arrivés au bout des cadrages et du montage particuliers (trois personnages dans la neige, on ignore où, à quelle distance ils sont les uns des autres ; leur conversation finit par être engloutie par la bande son, on ne sait pas ce qu'ils sont en train de se dire...)

Et, po-si-tif, je me suis dit :
alors là, bravo.

Pas facile de se libérer des comédies américaines et des automatismes hérités des années 40. Pas facile de se libérer de la notion de dialogues, de scénario, de personnages, de crédibilité, d'intérêt du spectateur. Mais c'est faisable.

Alors, si vous l'avez vu, vous pouvez me l'expliquer, ce film ? Perso, je n'ai rien compris.

Heureusement, pour finir, il y avait un bout de film d'horreur des années soixante sur Arty toujours : là, c'était franchement nul, aucun doute là-dessus. Boris Karloff, Christopher Lee, un vicaire anglais (le mec avait dû jouer 300 fois le même rôle), et de jolis sous-vêtements mauves.

Quand ça s'est terminé, Arty, jamais en reste, a lancé un film danois d'après un roman d'Hennig Mankell : j'ai tenu 30 secondes en me demandant comment ils avaient fait pour retrouver la voix de Jean Gabin dans la VF.

Dans le cadre de mes recherches sur les divers excitants ingérables par inhalation, je lance donc à nouveau un appel à témoins : c'est mes yeux, ou c'était vraiment une soirée télé à chier ?

Et le po-si-tif, dans tout ça ?

Bin, ça nous a donné quelques idées et pas mal de confiance en nos propres moyens, à Princesse et moi...

Le vicaire (le doigt sur le livre) : ...car Mullibert Manning n'était autre que votre arrière grand-père !!!
(note : remplacer les trois points d'exclamation par un tan-tannnnn musical)
CUT
Humperdinck Mannings réfléchit (gros plan sur son visage : il tourne la tête et plisse les yeux, comme s'il divisait mentalement 3152 par 714)
H.M : Vous voulez dire que...
CUT
Plan moyen, les deux hommes de face (ah merde, il faut deux caméras, sinon le raccord sera nul)
HM : ...Je serais son arrière-petit-fils ?
Zoom avant sur leur visages ; musique : rrrra--tttantanttann !!!
Les deux hommes ont l'air pensif (dans leur tête, ils extraient la racine carrée de 48569)

Scène 3 : Une blonde en sous-vêtements mauves.

Fin

Et voilà, c'était un post du samedi, jour du mauvais esprit.

Sinon, vous, ça va ?

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Tu me donnes des regrets, il avait l'air bien, ce film d'Arte.
Ce genre de trucs, je me demande toujours qui en fait la programmation : est-ce que le type qui a choisi "ça" a vraiment regardé tout "ça" avant de déclarer : "Ce sera bon pour vendredi soir , "ça" fera cinéphile."

Anonyme a dit…

J ai cru longtemps que cinéphile c'était une maladie rétiniennement transmissible mais heureusement il y a la 5 qui programme des films genre:
A.M.C.R (assoc maintien du ciné regardable)alors pour me faire très mal j'ai regardé la 6 (des fois je pique la télé aux enfants) et pendant une heure j'ai vu des bouts de clips tous pareils avec la même musique et une fille qui m'encourageai à téléphoner pour gagner de l'argent.
J'ai eu très peur et je suis bon pour une semaine de gouttes dans les yeux et les oreilles,vivement que mon fils fasse des films que même si ils sont pas achever je les trouverais géniaux.
A part ça je vous embrasse à plus.
YRF.

Anonyme a dit…

Il fallait patienter 24 heures... et regarder "Mafia blues" le dimanche soir. Excellent spectacle familial, de l'humour à chaque image et un De Niro hilarant et énorme en gangster dépressif qui s'attache par la menace les services d'un psy pour l'aider à combattre ses crises de panique et une paralysie devant l'action assez incompatibles avec sa dignité de mafioso.
Bien d'accord avec toi, la télé, c'est comme les melons, beaucoup sont courges...D'ailleurs je constate que c'est le premier film que j'ai regardé à la télé depuis un bon mois.