25.5.12

1010. Prolongations

4. Mais dis donc j'avais oublié
Ceci n'est pas une couverture, 2

Du 13 au 16 juin, Mo et ses frangines Ariane et Camille reprennent du service, parce que Tonton Maurice est toujours mort - au théâtre de Poche, dans le cadre de la Marche des Fiertés.

Ce qui tendrait je suppose à me situer dans la catégorie des auteurs régionalistes petits-bourgeois gay-friendly, pas étonnant que les grrrrands théâtres à qui je propose des pièces aient mieux à faire que répondre.


Ouh la, je suis amer, là, non ? Tu pas t'inquiètes : c'est les remontées acide de la soirée d'hier, dès que la pharmacie ouvre ses portes, ça ira mieux.

1. Ce que je n'ai pas dit à Luce W.

Elle a braqué sur moi son appareil photo et son sourire bienveillant, me lançant au détour du déjeuner en terrasse : "Alors, parle-nous de ton roman".
Hé bé comment dire alors ça raconte l'histoire de je veux dire - ça commençait mal.
Faut que je me rattrape, tout de même. Je vais m'y employer dans ces colonnes.

Il y a un secret, un secret de famille ; et un homme qui, trente ans plus tard, voit le monde se tordre autour de lui. Voit sa bouche disparaître et son identité se fissurer.

Il y a les fantômes qui le hantent -celui du grand-père suicidé dans une vigne, celui d'un monde avec un sens. Celui d'une femme, d'une étrangère impossible à aimer parce que trop réelle, trop semblable. Celui d'une langue disparue, insaisissable tant elle se tord et serpente.

Il y a l'eau des rêves - cette eau que l'on croit boire et qui ne désaltère jamais.

(et il y a encore du boulot, tout de même).

2. On en est là ?

Oui mais tout de même : ce doute permanent sur soi, ses pensées, ses sensations, de ses désirs, ses envies : c'est cartésien, ou juste chiatique ?

Il se dissipe, remarque. Très nettement en ce moment.

(et zut, la pharmacie est encore fermée, quelqu'un a du paracétamol ? Ah non zut on n'est pas sur facebook)

3. Imagine le type qui parlerait d'autre chose que de son

Ce matin-là dans ton haleine
il y avait moins de regrets
et presque
un bon gros rire
un espoir bossu et rond comme un sexe de femme
une tendresse sèche et tiède comme une peau d'homme.

Ce matin-là dans tes draps blêmes
tu lisais le bleu à venir

alors tu te levas en hâte, 
laissant dormir la forme molle de tes craintes,
espérant contre toute habitude que le bois du lit ne grince pas

- et tu connus le miracle d'être
lavé levé au premier matin.

 
 

24.5.12

1009. Une question d'ordre

Ceci n'est pas une couverture
1. Instantané

Ca faisait longtemps que je ne m'étais retrouvé aussi partagé (depuis que j'ai arrêté les, je pense). Du coup, je reviens faire un tour ici, histoire de vérifier que l'air y est toujours plus posé, respirable.
Si écrire, c'est ralentir pour mieux voir.
Pouf, pouf.
A ce stade du parcours, une question se pose : authentique ou imposteur ? Quand tu traduis un roman avant de déjeuner avec ton éditrice pour ensuite sauter sur ton vélo vers une répétition, qu'es-tu ? Un artiste, un vantard, un promeneur, un velléitaire, un homme perdu ?
Heureusement qu'il y a des détails comme le repas du soir le sport des enfants la voiture à réviser le nouveau CD à écouter qui font que tu perds encore plus la cohérence de ta journée. Depuis le temps que je m'agite, je ne sais toujours pas bien si j'y crois ou pas. En moi, je veux dire.
Ce n'est pas faute d'observer ; voilà, combien ? 1009 posts que je regarde comment marche ce truc que j'appelle moi, et j'ai toujours des doutes sur sa fabrication et sa fonctionnalité.
Pourtant, le vice n'est pas caché - ou alors à peine.


2. Préambule à ce qui précède (pour ceux qui lisent à l'envers)

Hors les doutes que je me permets d'exprimer dans la partie qui suit ci-dessus, voilà le programme des semaines à venir :

Mai (ce qu'il en reste) :  

Salon du livre de Villeneuve-sur-Lot (samedi 26)
Venez nombreuses, j'ai des livres à vendre et je porterais un T-shirt moulant (aux épaules seulement. un genre de robe de grossesse, c'est préférable pour nous tous).

Le 30, représentation unique et exceptionnelle de La Fête à Fred au Chapeau Rouge, dans le cadre du festival de solos théâtraux "Coup de chapeau". Ce serait bien que tu y soies et que tu applaudisses, car le jury choisit son oeuvre préférée pour la programmer l'année suivante. Et Jean-Paul Bibé est grand.

Juin  : Ouh la ça s'agite. Aaaalors : 

Dimanche 3, Salon du livre de Pamiers : lectures musicales (rahrahaah putain il faut qu'on trouve un meilleur nom d'autant qu'on vient de finir le mastering du CD, tu n'as pas une idée, toi ? Pour l'instant, on n'a que Voix/Nouvelles). 10h, médiathèque - à la place de la messe, si tu veux.

Samedi 9 et dimanche 10 : Ouh alors là, on est dans la fierté absolue - dans le cadre du festival Passe ton bach d'abord, électrorécit avec l'ami Sylvain Loyseau. 19h et 22h le samedi, 15 h le dimanche. Et l'occasion, avec "Que ma joie demeure", de raconter une histoire qui me tient à coeur depuis des années. Une forme à part pour une occasion à part... il me tarde que nous.

Samedi 16, spécial dédicace au Team Aveyron : La Fête à Fred à nouveau, cette fois au Centre Social de Bozouls, Aveyron (le village avec le trou, exactement) - et si tout se passe bien, on finit en planches...

Du coup, rien pour le 24, mais ça ne saurait tarder à. Cela dit, c'est également en juin que sort (je crois) Bruxelles ou la grosse commission, e-novela aux éditions Onlit - l'occasion, selon moi, de s'acheter une liseuse pour pouvoir lire l'histoire d'un type avec une sacrée envie.
Tant qu'à être en Belgique, et pour nos amis de la presse et des blogs spécialisés, les éditions Luce Wilquin proposeront un premier tirage SPcial de L'eau des rêves, roman.


3. Et maintenant (que vais-je faaaaaaaaaire)

Mes autres problèmes à ce jour : où trouver le temps de peindre, l'amour est-il soluble dans la fidélité, pourquoi tant de colère quand tout nous sourit pourtant, je ne t'ai pas présenté Tata Vulvinia, les réunions de famille sont-elles l'endroit idéal pour parler d'un roman familial, qu'y a-t-il de plus triste qu'un vampire américain, où est passé Robertson Davies, combien faut-il d'exercices pour trouver la sérénité, et comment s'habiller quand il n'y a plus de saison ?

Sinon, comme d'hab : tout va bien, et toi-même ?

11.5.12

1008 - Perdu dans mes contes

I'll be writing you
1. Ouh la c'est difficile

Information sans aucun intérêt : blogger a changé de présentation et je tâtonne à présent pour écrire un post comme un grand-père ouvrant son nouveau télérama. Parler de ça, et Mickaël Vendetta (nan, pas de lien, faut quand même pas), sont typiquement des façons de dilapider de l'espace numérique.
E., quand nous photographions, s'amuse : "ne gâche pas de pellicule". Nos pixels cela dit sont stockés sur des espaces de plus en plus grands, de plus en plus consommateurs d'électricité. Il y aura un jour un continent informatique comme ce continent de plastique qui dénature l'océan. Et nous chercherons une solution nouvelle.
Chut. Seul le silence - et le sourire au vent.

2. Lecture

Dilemme hier : plus de livre d'avance dont la couverture l'auteur le titre le thème parle à mon ventre, fasse naître l'envie dans la poitrine, et ce malgré nos achats aussi bien chez les bouquinistes de Montolieu que chez les distributeurs en ligne (vois ici ce que dit une écriveuse de sa liseuse - un post magnifique, comme elle est belle quand).
J'allais me résigner à me taper la énième imitation de Twilight que j'ai à traduire en ce moment lorsque je tombai sur un exemplaire d'occasion de The abortion, de Brautigan - l'histoire d'un bibliothécaire qui n'accepte que des oeuvres uniques que des écrivains viennent eux-mêmes placer sur ses étagères.
Depuis hier soir je ris à cette naïveté feinte, à cette simplicité dans l'étrange, à ces phrases qui m'emmènent sur des chemins jamais explorés.
Chouette. J'ai trouvé un copain et un point d'intérêt majeur pour les jours qui viennent.

3. L'esprit de l'escalier de Charles Bronson

Passage piéton avec Zadig - la Twingo ne fait pas mine de ralentir. Je l'ai bien vue, pousse un cri pour attirer l'attention du conducteur - en général un vieux monsieur affolé ou une dame toute affairée, qui s'excuse - lui montre le feu qu'il vient de griller.
Mais le jeune type de 19 ans, que je vois dans le quartier avec sa casquette à l'envers depuis des années, ricane ; comme pour nous défier, il prend un virage au frein à main, apostrophant au passage un groupe de dames âgées scandalisées.
Depuis, j'attends de le retrouver, à pied. Pour lui dire "Jeune, mon ami, que tu joues au con ne m'effraie pas tant que ça ; mais, jeune, mon voisin, es-tu certain que le pays manque à ce point de connards racistes pour que tu te sentes le besoin de leur donner des raisons" ?
Un vrai petit vengeur masqué. Sans le masque.

4. Parce qu'il faut un 4.

Et toi, tu vas bien ? Non, parce que je parle, je parle, mais du coup. Et ça fait longtemps que. Alors, quoi de ?


6.5.12

1007. Histoire d'attendre

Bois danois
1. Où fut Avril ?


Ah d'accord : je tourne le dos quelques secondes, je me consacre à autre chose, et hop, voilà : un mois entier est passé sans post. Zoé m'avait prévenu, on me voyait peu en ce moment, mais là tout de même, je suis le premier surpris.
Il faut croire que j'avais autre chose à (dans le désordre : réfectionner Déjà que tout seul j'ai du mal à vivre ensemble, recueil de nouvelles ; mettre en scène En attendant Daniel ; préparer mon premier texte exclusivement numérique et belge, Bruxelles ou la grosse commission ; corriger L'eau des rêves, roman, pour sa sortie à l'automne... et encore, on ne parle que du plaisir textuel).
Ca ne m'a pas empêché de voir des choses.

2. Leçons d'émerveillement

Copenhague, pour un ouikend : marcher des heures, synchrones, ouverts, silencieux ; effleurer la mer, se poser aux terrasses, découvrir, explorer, admirer. Sans rester béats pour autant.

Les Danois sont gens bien nets ; le soir, dans les parcs, ils vident de longues cannettes que des indigents ramassent avec un mot d'excuse.

Pour la ville et ses ciels, j'ai des photos ; pour Christiania, le quartier indépendant, j'ai des impressions. Mais pour le musée de Louisiana, j'ai des envies de partage.
Il y avait, outre des Giacometti vibrants, une exposition sur les femmes de l'avant-garde, où j'ai découvert entre autres Dora Maar et Claude Cahun - frappé par les points communs de leur démarche, par leur familiarité aussi (l'univers d'E. me les rappelle) ; guidé par un commentaire éclairé, intelligent, j'ai retrouvé ce plaisir, un peu perdu dernièrement, de regarder autour, de regarder l'autre, de m'en laisser conter.
Il y eut aussi les photographies d'Andrea Gursky, qui détiennent le douteux privilège de figurer parmi les plus chères du monde ; mais au-delà de ce titre discutable, leur démesure, leur composition, le sens qui s'en détache - le tragique parfois, parfois le narratif, le surprenant, le documentaire, ou l'abstraction - en font bel et bien des objets fascinants, admirables au sens strict du terme.
Mais ce fut Yael Bartana qui me surprit le plus : cette artiste polonaise a tourné trois films relatant le retour de millions de Juifs en Pologne, à l'appel d'un activiste polonais. Le premier court-métrage reprend les codes oraux et filmiques des discours du Reich ; le deuxième parodie les films de propagande, en particulier ceux dédiés aux kibboutz ; le troisième, enfin, plus long, lorgne du côté d'un cinéma américano-européen moderne, en mélangeant individus et mouvements de masse et en faisant une part belle au pathos ; c'est aussi celui où la réalisatrice égratigne le plus Israël. Sa posture de candeur intelligente - et si venait un appel au peuple, un appel au pardon, à la guérison des maux? - m'a ravi,réchauffé, encouragé.
Connaître l'Histoire et ses signes sans s'empêcher pour autant de rêver.
Un peu à ça que sert, l'art, je suppose.


3. Mélangisme artistique

Et voilà que, suite à une discussion véhémente au détour d'une soirée, je me retrouvai hier au dernier soir de l'édition toulousaine du festival La voix est libre, au théâtre Garonne, où se rencontrent des artistes venus de tous horizons.
Hier il y eut Miguel Benasayag - lumineux - un texte de C. Pennequin dit et bruité par deux comédiennes - original, inhabituel, même si parfois un peu déséquilibré - une performance voix/danse de Dieudonné Niangouna et Qudus Onikeku  à couper le souffle, et enfin un concert de Bernard Lubat,qui, du haut de son "jazz baloche" (la formule n'est pas de moi), se demandait si demain, sarko'mençait, ou s'il fallait croire Hollande-mains qui chantent.
Parce que oui, ce fut une soirée préélect'orale, tout en rencontre, en coups de coeur et de cris, en explorations / expérimentations, en mélanges, une soirée festive et drôle, une soirée comme on en rêve de vivre plus souvent, dans un climat d'écoute et de partage, un moment de bonheur...
Et c'est à peine si on parlait de politique.

4. Parce que bon, tout de même

A l'heure où j'écris, aucune fuite dans la presse internationale n'annonce un écart de cinq à six points en faveur du candidat de gauche. Je dis bien de gauche, même si mes copains de la vraie-gauche-qui-sait traitent les socialos de socialistes, ou l'inverse je ne sais plus, même s'ils m'annoncent leur trahison.
Intéressante variante apparue pour le premier mai : la gauchiste féministe pour laquelle tu es un salaud parce que... tu parles (avec des couilles, mais pas seulement).
Attention notule : N'hésitez pas à écouter la dernière émission de Pas plus haut que le bord pour davantage de détails (j'en profite pour préciser que, depuis près de deux ans, je suis apparu dans cette émission sous les traits  d'Aymeric, chroniqueur UMP, et que le Manu qui chronique est, bin, un autre chroniqueur. Voilà voilà).
Tout ça pour remarquer qu'effectivement, les soirées au théâtre, les après-midis au musée, ont un parfum terriblement bobogauchiste - un événement Télérama, n'est-ce pas ? Et que pourtant, ce sont elles qui ouvrent à l'autre, qui permettent de saisir sa culture, sa différence, et de remettre les nôtres en perspective ; que l'élitisme que l'on reproche parfois à la culture est un bon prétexte pour l'escamoter et la remplacer par des produits consommables, prêts à l'emploi et uniformément tièdes.

Alors bon, voilà. J'attends le résultat d'un vote en me disant que, pour la première fois de ma carrière d'électeur, j'ai une chance de voir élu un candidat dont le discours présente des valeurs dont je me sens proche.
J'ai un peu les miquettes, tout de même, parce qu'en revanche, je m'y connais davantage en matière de déception ; et je me dis que, si tout se passe bien, demain - il faudra se remonter les manches, se mettre au travail, se préparer à voir bouger le navire - en sifflotant, s'il vous plaît, parce que tant qu'à être dedans, autant y prendre du plaisir...
A demain (ou au moins prochain) pour l'an 1 ?

5. Et puis, l'important

Les  mots guérison et rémission n'ont pas
vraiment de sens mais
je te vois à présent libéré
non seulement des contraintes médicales mais
de la tristesse, du doute que
je te connaissais depuis dix ans peut-être, peut-être plus
- je te prends dans mes bras, boule de muscles qu'enfant si lointaine,
que mes longs bras d'adulte ou presque reconnaissent à peine
et célèbrent, 
et je te blottis aussi comme un fils
toi qui m'appris à être père
à être fils
toi qui m'apprend désormais que

sourire est 

survivre
se battre, avancer, décider,
choisir le camp de la vie
en chérissant notre faiblesse,


et ce jour-là, Papa, champagne ! Nous avions gagné.