1) Deuxième jour : maaaatch et ses conséquences
Ainsi triomphons-nous de nos adversaires par un match nul ; recousant ce qui est à recoudre (une oreille), pansant ce qui est à (au moins un oeil), nous assistons au match suivant depuis la touche. Dans nos coeurs, la fatigue triomphante, la joie sauvage de ne pas avoir été anéantis par le golgoth croate, le doux sentiment du devoir accompli - "hébéputin", en toulousain dans le texte.
Au bord du terrain, outre nos douces admiratives, une sono guerrière qui ponctue chaque essai (peu nombreux) et chaque verre de bière (qui tombent dru) par un bruit assourdissant, mêlé de chansons du crus. Néanmoins, nous ne cédons pas à la torture psychologique, et nous préparons au match suivant.
Quand il s'agit de se re-échauffer, le bruit le plus audible est, sans conteste, celui de nos articulations ; trente minutes après notre miniguerre des tranchées, courir est, en soi, un exploit.
Plus qu'un match se dit "ouÿe". Fort heureusement, les Italiens que nous affrontons en conclusion du tournoi ont eux-même survécu à deux matchs contre des Croates, et optent pour un engagement tout relatif, façon Bisounours hésitants. On en profite pour marquer deux essais, nous assurant (si j'ai tout bien compté) une place de premier ex-aequo du tournoi ; comme il nous reste suffisamment de temps pour marquer quelques points et gagner ainsi de façon incontestable cette rencontre internationale, nous choisissons de merdoyer un certain temps, enchaînant passes ratées et erreurs avec une belle rigueur. (P., notre ailier-mascotte, s'offre en particulier un en-avant de toute beauté, dont il nous expliquera un autre soir la technique en remplaçant le ballon par une bouteille de vodka.) Néanmoins, le dernier tiers-temps nous offre l'occasion d'une paire d'essais supplémentaires, et c'est toukontan (heureux, en Croate) que nous regagnons les vestiaires. Un bonheur n'arrivant jamais seul, la pluie se met à tomber doucement, obligeant la sono à plier avant que les plus enragés d'entre nous n'aillent en bouffer les câbles.
Puis, dans l'ordre : bière, repas, bière, vin, chansons, discours, traductions, discours, bière, oupe-là il est temps de rentrer, bière, bus, bus, bus, bus, bus... bus, bus, bus... dormir, bus... bus... Ceux qui ne parviennent pas à dormir recomptent leurs douleurs et bonheurs du jour en regardant tourner la route côtière.
Puis hôtel, enfin, et comme on dit là-bas, bododo.
2) Troisième jour : "çaslev"
L'expression "çaslev" se traduit en croate par "meuh non il ne pleut pas", ou "attendez un peu, le soleil arrive". C'est donc en se répétant ce nouveau terme que, ce dimanche-là, nous découvrons la petite station balnéaire de Cavtat (se prononce "savtat", si jamais). Bon, bin c'est de la mer, des pins, des sentiers, des murs blancs... sous la pluie. Enfin, pas la pluie vraiment, hein, juste cette espèce d'humidité fraîche qui rappelle la Normandie en avril ou l'Ariège en plein été.
On se croise dans les couloirs de l'hôtel et sur la promenade ; on échange des sourires un peu mous. Très vite, néanmoins, l'organisation reprend ses droits, et nous entamons la soirée par un apéro face à la mer, où le soleil, sans doute payé par le syndicat d'initiative, vient nous dire que oh, pas de blague, il sera là demain, et en plus il est super sexy sur l'Adriatique.
Pour conjurer le sort du mauvais temps, on décide au dîner de sacrifier aux dieux croates de la météo l'orteil enflé de C. - l'opération, sanguinolente, a lieu directement sur la table du restau, histoire de montrer qu'on n'est pas là pour se faire des collègues. Par la suite, la grande table du fond sera systématiquement occupée par les Gonins, malgré quelques tentatives de rapprochement de divers groupes attirés par le bruit.
C'est ce même soir que le fameux bar all-inclusive nous révèle ses premiers secrets : la pils croate, immédiatement surnommée pils d'âne ; la slivovic, traduite en anglais par "local prune brandy", et dont le nom est également synonyme de "brûlures d'estomac particulièrement vicieuses".
Malgré le froid et l'humidité, nous squattons la terrasse de l'hôtel, sauf pour des incursions sur la piste de danse. Est-ce ce soir-là qu'a lieu la première démonstration de paquito ? C'est possible, mais, comme on dit en Croate, "mal'latèt", ce qui signifie je ne me souviens pas bien.
3) Quatrième jour : le Monténégro ou l'autre pays du sourire
Petite république résolument tournée vers l'Europe (la guide tentera de recruter, non sans succès, quelques-uns de nos plus fiers rugbymen pour créer la future équipe monténégrine de rugby vétéran), le Monténégro - Montchinégro avec l'accent est... chouette.
Il y avait, dans l'ordre, du soleil moins timide (un poil de pluie), une église au milieu d'un lac calme, la muraille de Kotor, la guide, les rues de Kotor, la guide, le resto tranquille de Kotor, la guide... Nous apprenons le mot "trèjoli", qui désigne une accompagnatrice touristique aimable pour les yeux. C'est un vrai plaisir d'écouter/visiter/marcher dans cette ville aux murs de pierre, au croisement des influences vénitiennes, turques et slaves ; on croise quelques géants souriants ; le Monténégrin, nous explique-t-on, est célèbre pour la qualité de sa flemme. Nous assumons notre côté touristes en flânant dans la ville fortifiée.
Puis On laisse Kotor (et la guide, donc) avec quelques regrets, pour visiter une station balnéaire de moindre charme (blingbling, en monténégrin), puis un centre culturel de produits internationaux ("carrouf"). Malgré les craintes de notre guide, les douaniers peu enclins à la plaisanterie et craignant l'espionnage industriel, on nous laisse ressortir du pays sans trop d'encombres.
Bus, apéro, repas, bar et discussions philosophiques sur la terrasse : la soirée-type est établie, on prend nos marques.
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