23.5.07

Once I was a writer (un p'tit souvenir)

C'était une soirée, avec des amis, quelque part dans le Gers. Une de ces fêtes de village avec des bancs, des tables recouvertes de papier et des plats en sauce arrosés de Madiran.

Les amis parlaient avec leurs amis - collègues, parents d'élèves, voisins, types du supermarché. Moi, j'étais le célibataire sans enfants, le type au week-end vide que les amis recueillent et à qui ils s'adressent avec des précautions inhabituelles. J'écoutais les conversations qui ne m'intéressaient pas. Je posais des questions à Machin, machinalement. Je regardais les femmes célibataires. J'avais les yeux dans le vide, parce qu'il n'y en avait pas.

Et puis le type d'en face, le un peu gros avec sa chemise propre, a demandé à mon copain, "Et ton copain, il fait quoi ?"
Je devais être trop vague pour qu'il me parle directement.

S. a répondu sur un ton un peu admiratif , un peu gêné, "Ben, il écrit des livres".

L'autre m'a regardé. Je me suis senti petit, empêtré et chauve. Il a eu ce mouvement d'épaule, cette façon de relever ses sourcils. Il a simplement dit :

"- Ah oui ? Il y en a qui ont besoin de ça."

Il a regardé ailleurs et s'est remis à parler de voitures.

Et moi, moi, j'étais juste mort. Une fois de plus.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Certains se nourrissent chez Macdo,parlent voiture,baisent bobonne
et se feraient bien aussi la voisine.

D'autres regardent,écoutent,parlent et font des choses qui parraissent
futiles aux yeux des autres.

Tu écris,je peins,tu as une princesse,je fais de la photo.

Continu Manu et ne doute jamais.

Anonyme a dit…

Le type, il parlait de qui, à ton avis, quand il disait "Il y en a qui ont besoin de ça" ? De l'auteur, ou des lecteurs ?

C'est terrible, cette incompréhension du regardeur de TF1 de base, ce mépris induit de toute culture. Pour eux, la littérature, l'art, la création... sont des maladies, des lubies, des folies douces.

J'ai eu une altercation avec des CRS, il y a un ou deux mois (j'ai dit à mon gosse, en les voyant arriver "tu vois ce que tu feras plus tard si tu travailles mal à l'école", et malheureusement ils ont un cerveau ravagé, mais des oreilles en bon état), et le "chef" (sic), après m'avoir assuré qu'il avait fait plus d'études que moi (sans m'avoir demandé ce que j'avais fait comme études, mais ils les forment aussi aux boules de cristal, à l'école de flics), s'est esclaffé avec un petit sourire méprisant "on est tombés sur un intellectuel". Je venais de lui dire qu'il avait une vision une brin manichéenne du monde, et une ombre d'incompréhension avait voilé sa pupille terne.

Anonyme a dit…

Ben, moi j'ai besoin de gens qui ecrivent des livres, sinon je me dessèche de l'interieur. Meme si les histoires qu'ils racontent me font pleurer et manquent parfois cruellement de bisounours et de lapins bleus qui gambadent dans l'herbe au petit matin.
Ce type aurait surement eu la meme reflexion si tu avais dit que tu etais prof, ou que tu etudiais la structure du virus de la mosaique du chou fleur par microscopie electronique et analyse d'images (un exemple au hasard, hein!).
Bah, c'est pas grave, on est toujours l'inutile de quelqu'un.
Et est-ce qu'il a un article dans Wikipedia, ce type? Passque toi oui, nananè-reuh!

Anonyme a dit…

erratum dans ton texte Manu Causse ! tu as voulu écrire :

... le GROS con d'en face avec sa chemise entr'ouverte trop étroite pour lui depuis qu'il bouffe tous les midis au resto vu qu'il a un job surpayé avec RTT congés payés et ticket resto et même voiture de fonction et qu'il vient se faire chier dans le Gers chez des vieux potes...

même qu'il était jaloux ce con.

même qu'aujourd'hui il a vu ta tête de petit chauve pas du tout mort sur la quatrième de couv d'un livre et qu'il s'est dit ''beh merde té putaing cong ! y en a qui ont de la chance''...

je t'M Manu Causse.

t'arrête jamais. d'écrire en tout cas !

même quand tu seras mort.

M