15.7.09

712 - MArdi, je te raconte*...


Rahoul grimpait, grimpait, et grimpait encore ; les branches épaisses formaient comme une échelle qui s'effaçait sous ses pieds.

Là-bas, tout en bas de l'Arbre, Esag arriva hors d'haleine. Il appela encore - sa voix s'était faite pressante, mais les branches l'étouffaient.

Peut-être que Rahoul ne pouvait plus l'entendre. Ou peut-être qu'il ne le voulait plus.

Car la voix d'un père qui rappelle, qui ordonne, qui interdit était la dernière chose qu'il avait envie d'écouter.

L'écorce de l'arbre mordillait la peau de ses mains, les branches au passage lui fouettaient le visage ; mais Rahoul se sentait plus libre, plus vivant que jamais. Il respirait l'air de l'Arbre, la caresse des vents, l'odeur de l'altitude.

Il y eut peut-être des larmes sur le visage d'Esag pendant qu'il pensait à son fils et aux mots qui ne passaient plus entre eux. C'est d'ailleurs ce jour-là qu'Esag inventa la culpabilité paternelle*.

Il imaginait déjà la chute de Rahoul, le fracas de son petit corps à travers les branches et sur le sol - ou, au contraire, la décision de son fils de rester dans l'Arbre, d'être avalé par lui, de disparaître à jamais.

Derrière Esag, la pléïstéchione déboucha à son tour dans la clairière au pied de l'Arbre.
Voyant qu'il ne se passait rien de très marrant, elle se mit à brouter.

Un rayon de soleil soudain entre les feuilles vint se poser sur le front du papa de Rahoul ; et, comme tous les hommes avant lui, il y trouva du courage - celui d'imaginer une plus belle issue.

Et Esag - Esag qui avait le vertige, Esag qui au fond n'aimait pas bien les arbres, empoigna la première branche et se mit à grimper à son tour.

Dans la clairière, la pléïstéchione continuait à brouter.










* et * : oui, je sais, mardi a tellement duré qu'il en est devenu mercredi. Peut-être pour cause de Fête Nationale ou de vraies vacances du calendrier, allez savoir. Ou encore pour être resté un peu longtemps avec mon non-lecteur préféré devant les histoires de Tolkien , ou d'avoir beaucoup raconté hier, ou beaucoup pensé à E. ce soir, ou, ou, ou - hou la honte, quoi qu'il en soit... Promis, je ne le referai plus.

2 commentaires:

Zoë a dit…

Bof mardi, mercredi c'est Esag qui nous intéresse. Suis à Avignon. Bises

Anonyme a dit…

Lulu a lu...

"procrastiner" le mot non ? ;)