23.6.09

701 - MArdi, je te raconte


La nuit s'était levée, et dans les arbres, les hommes dormaient.

Seul Rahoul veillait ; sous la clarté de la lune ronde, il regardait l'arbre. Il regardait l'arbre, et écoutait les questions qui venaient à lui. Elles chantaient sans cesse dans son esprit, petites choses mal formulées, un peu confuses, qui l'empêchaient de trouver le sommeil.

Quel est le sens de tout ça ? Que puis-je faire pour les autres ? Qu'est-ce que les autres peuvent faire pour moi ? Pourquoi ne puis-je pas simplement attendre, comme tant de mes semblables, que les jours se répètent, espérer que rien n'arrive, que rien ne change ? Pourquoi y a-t-il au fond de moi cette petite flamme qui me pousse à parler, à inventer, à réfléchir, à passer d'arbre en arbre sans jamais m'arrêter sur une branche ? Est-ce une maladie, une anomalie génétique ? Pourquoi ne puis-je pas jouer toute la journée avec la pléïstéchion (le pléistéchion était un genre de dinosaure relativement inoffensif, très courant à l'époque de Rahoul, dont la fonction principale était de garder les enfants. La tribu de Rahoul avait adopté une femelle, avec laquelle il adorait s'amuser ; mais pour une raison mystérieuse, les grands ne les laissaient pas passer toute la journée avec elle).

Toutes ces questions, et bien d'autres encore, tournaient sous le crâne de Rahoul, partaient, s'effaçaient, et revenaient sans cesse, comme le tourbillon de l'eau prise entre des roches. Et plus elles revenaient, plus Rahoul pensait à l'arbre.

Il lui arrivait de douter des paroles de son père ; après tout, Esag adorait raconter des histoires, toutes sortes d'histoires, et il lui arrivait certainement d'en inventer pour toutes sortes de raisons. Mais ce qu'il disait de l'arbre, que ce soit vrai ou non, avait éveillé dans le coeur de son fils une vague d'images et d'idées.

- Si je pouvais entrer dans l'arbre, pensait Rahoul, peut-être trouverais-je la réponse à toutes mes questions..."

Lorsque la lune se trouva exactement au milieu du ciel, Rahoul se mit sur ses pieds ; sans un bruit, il se laissa glisser de l'arbre. L'air était doux, l'herbe tiède sous ses pieds ; le vent murmurait des aventures.

Après un dernier regard pour le campement où dormaient les Zautres, il vit volte-face, et s'enfonça dans la forêt en direction du Grand arbre.

2 commentaires:

Dahu l'Arthropode a dit…

Msieur Manu Causse, j'aimerais bien savoir si vous écrivez d'abord la musique ou les paroles: c'est-y le mardi qui se raconte d'abord et des liens qui viennent s'y loger ensuite selon les illustrations glanées? ou bien c'est-y les liens vers les trucs à voir que vous habillez ensuite d'un mardi, du genre "je parie que je sais inventer un mardi autour de ça, ça et ça"?

Le truc rigolo, ce serait qu'on se cotise pour te proposer un lien chacun, et que tu doives faire les mardi autour. Ce serait un jeu de l'OuLiPautre (les contraintes, c'est pour les autres).

Tu dors? Dis, tu dors?

Manu Causse a dit…

Je ne dors pas, je doute, comme tu peux le voir dans le billet suivant.
Le mardi se raconte comme il l'entend, sans que je puisse y faire grand-chose ; les liens viennent ensuite, grâce à une formule philosophico-arithmétique complexe dont je ne révèlerai le secret que sur mon lit de mort.
Tant qu'à parler d'Oulipautre, je me dis qu'il serait sans doute préférable que TU réutilises les liens d'un mardi pour en faire un texte qui se tienne... non mais ho, j'ai du boulot, moi.

des bises